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DOSSIER LABO

Vincent Liquète, Etienne Damome, Valérie Carayol, Franck Cormerais, Cécile Croce, Alain Kiyindou, Maria-Caterina Manes-Galo, Nicolas Nercam et Catherine Pascal

Cahiers de la SFIC spécial MICA
Le MICA : une unité de recherche au carrefour de l’information, la communication, les médiations et les arts

Article

Table des matières

Texte intégral

95-133

Introduction générale

1Depuis les rencontres doctorales de la SFSIC de 2011, intitulées « Problématisation et méthodologie de recherche », l’unité de recherche MICA n’avait plus eu l’occasion d’accueillir la communauté des chercheurs en Sciences de l’information et de la communication via sa société savante.

2Le MICA, unité résultante de la réunion du Centre d’études des médias, de l’information et de la communication (CEMIC, EA 4200) et d’IMAGINES (EA 4199) en juin 2009 a été gérée successivement par 4 directeurs/co-directeurs respectifs. En conduisant progressivement des mutations au fil des recrutements, des rapprochements avec les sphères sociales et scientifiques, des opportunités et des sources de financement, l’unité UR 4426 conserve un socle fondateur de son épistémé à savoir les analyses :

  • des médias et des conditions de leur réception ;

  • sémiotiques de l’image, des textes et des médiations ;

  • des phénomènes de mutation et de transition de la gestion de l’information, des données et des documents ;

  • des arts et les mises en art réarticulant les problématiques communicationnelles, médiationnelles et sociétales actuelles ;

  • des phénomènes de communication dans les organisations et les espaces contemporains ;

  • Enfin, de la circulation des idées voire des idéologies notamment autour des thèmes de l’innovation.

3À l’ensemble de ces domaines fondateurs pour le MICA, la question retenue par la SFSIC à l’occasion de son 23e congrès sur la « Numérisation des sociétés » fait sens et convoque un ensemble de préoccupations que les 60 enseignants-chercheurs statutaires, 95 doctorants et 50 associés partagent dans leur quotidien.

4De nos pères fondateurs, comme les professeurs Robert Escarpit, Robert Estivals ou André-Jean Tudesq, le MICA est également le fruit héritier de nombreux chercheurs engagés des années 1980 à fin 2010.

5En effet, le MICA revendique une tradition autour de l’analyse des médias de masse et des transformations culturelles et sociales qui font face, l’évolution et la diversité des communications dans les institutions et leur mutation, l’analyse des mutations et des hybridations en matière documentaire et informationnelle, l’émergence des phénomènes contemporains autour des humanités, des design, des innovations émergentes, la place de l’art et des formes d’expressions artistiques dans le champ social, les analyses sémiologiques et sémiotiques des images, des documents, des écrits. Ces domaines d’analyse constituent notre ADN à travers plusieurs générations de chercheurs. Ce cahier dédié au MICA est aussi l’occasion pour nous de remercier nos chercheurs associés, nos fidèles partenaires (associations, fondations, musées…), nos personnels permanents et contractuels qui font vivre l’unité dans son quotidien.

6Depuis la prise de fonction de la nouvelle direction, notre objectif scientifique principal est de produire des analyses qui permettront d’éclairer les transformations des sociétés et des organisations contemporaines, à partir des mutations des modes de médiation, en prenant particulièrement en compte deux phénomènes :

  • celui d’une multiplication des interdépendances entre les sociétés et les cultures, liée aux mouvements de population et au développement des échanges et des flux marchands, mais aussi à la visibilité et à l’ubiquité permises par le développement des réseaux et des flux de communication et d’information, ainsi que par la diffusion planétaire de produits issus de l’industrie de l’information et des arts « à base de connaissances ».

  • celui d’un développement des pratiques numériques, notamment en réseau, qui produisent de nouvelles possibilités d’approches à la fois de l’altérité, des identités, mais aussi du réel et des imaginaires et qui autorisent la conception de nouveaux outils, services ou produits, construisant de nouvelles temporalités sociales ou modifiant l’expérience du monde et le sens donné aux interactions. L’enjeu pour nos chercheurs est de repérer et d’analyser ces nouveaux environnements info-communicationnels et d’en comprendre les logiques explicites et implicites.

7De ces objectifs, découle un ensemble d’activités faisant notre vie et notre quotidienneté de chercheurs à savoir :

  • La production de savoirs : les compétences des six équipes constituant le MICA permettent de mener des recherches scientifiques en Sciences de l’Information et de la Communication et en Art et de répondre à des appels d’offres de recherche régionaux, nationaux et internationaux. Ceci nous permet depuis des années de bénéficier d’un budget de fonctionnement largement construit sur nos dynamiques de recherche et notre culture de réponses aux appels à projet. De ces mêmes projets, nait un ensemble de publications sous forme d’ouvrages collectifs ou individuels et à d’autres types de publications scientifiques, permettant de diffuser les savoirs et nos résultats de recherche élaborés par nos chercheurs et mis à disposition de la communauté SIC par le biais de collections monographiques et des revues.

  • La formation à/par la recherche : labellisée équipe d’accueil pour la formation doctorale en Sciences de l’information et en Art (EA 4426), le MICA participe à la formation doctorale de l’Université Bordeaux Montaigne au sein de l’École doctorale Montaigne-Humanités. Nos chercheurs sont les fers de lance notamment autour de l’émergence de nouvelles questions info-communicationnelles, de la démarche méthodologique quali- et quantitatives, du design participatif et des protocoles croisés. Enfin, nous sommes associés au portage des enseignements sur les plans de gestion des données et de conservation ce ceux-ci avec le service de la documentation. Chaque année le MICA propose de nombreuses soutenances de thèses et d’habilitations, des masters class et exporte de nombreuses formations auprès d’universités étrangères partenaires.

  • La coopération et le développement de projets de recherche internationaux : le MICA développe des projets de coopération en direction des Universités du Sud et des projets de recherche internationaux en coopération avec des chercheurs d’Europe, d’Afrique, d’Asie du Sud-Est et d’Amérique Latine. Il mène une politique de coopération internationale ambitieuse. Le MICA entretient des partenariats internationaux avec un ensemble d’universités européennes, canadiennes, africaines, indiennes, coréennes et chinoises. Il reçoit régulièrement des professeurs invités dans le cadre de ces collaborations. Il s’appuie également sur une chaire Unesco d’excellence. La politique de coopération s’est renforcée ces derniers mois, avec de nouvelles dynamiques d’intégration de réseaux, comme celui de la francophonie via Francophonéa, le réseau thématique CNRS Éducation, les réseaux régionaux de recherche, etc.

  • La diffusion et la valorisation des savoirs scientifiques académiques : en effet, nos chercheurs éditent des revues, dirigent des collections dans diverses maisons d’édition, organisent des colloques, réalisent des films pour promouvoir la circulation des savoirs au sein de la communauté scientifique et de la société civile. Actuellement, nous travaillons activement à l’archivage et à l’accessibilité de nos diverses collections au service de la communauté de lecteurs.

  • La recherche partenariale et la valorisation socio-économique de nos travaux : chacun de nous participe à la valorisation socio-économique des savoirs produits par l’animation de séminaires, l’organisation de conférences, et la collaboration à des associations de professionnels et/ou scientifiques. Ainsi, le MICA pilote de nombreuses recherches appliquées ou transférées où l’innovation et l’expérimentation sont les maîtres mots chez nos partenaires institutionnels ou économiques. Ainsi, nous densifions ces derniers mois des partenariats avec notamment des thèses CIFRE ou des contrats doctoraux.

8Nos perspectives à quatre ans sont progressivement de maintenir nos 6 axes de recherche tout en renforçant la transversalité et les participations inter-axes. Pour ce faire, nous misons ces prochains mois sur des dépôts de projets autour de 3 vocables que nous avons retenus collégialement à savoir : la protension, la transition et l’inclusion. Nous travaillons actuellement sous forme de séminaires et d’ateliers à la définition et à la délimitation épistémologique et théorique de ces objets, en tentant petit à petit de construire une base commune de questions scientifiques et de partage de questionnements.

Vincent Liquète et Cécile CroceDirection du MICA

Axe ADS : Art, Design et Scénographie : Figures de l’urbanité

9Le projet général de l’axe est d’analyser les figures de l’existence, les œuvres, les objets ou les dispositifs comme des figures de l’art-design, car son présupposé est que le monde est devenu un monde de « l’artdesign ». Portant ce désir de beauté illimitée jusque dans les moindres activités de la vie quotidienne, les artistes-designers ne « doivent plus être associés à une spécialité, mais à un certain état d’esprit d’ingéniosité et d’inventivité… permettant de considérer des projets non plus isolément, mais en relation avec les besoins de l’individu et de la communauté », comme le remarque fort justement Laszlo Moholy-Nagy ; et c’est pourquoi ils sont partagés entre la tentation platonicienne d’un « design totalitaire » propre à faire des citoyens des consommateurs compulsifs, distingués et dissociés en castes d’or, argent ou airain et celle d’un « design global » ou « d’interaction » propre à stimuler leur désir de participer activement à la création d’une « sculpture sociale » faisant rimer démocratie, beauté, pluralité et versatilité. C’est dans cette tension que travaille l’art qui suscite chez tout un chacun le désir de designer au mieux son existence.

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10La diversité des conceptions de l’art-design des chercheurs de l’équipe constitue sa richesse et le ferment d’un dialogue mené collectivement : enjeux anthropologiques de la création et leurs implications politiques (écoféministes, décolonialistes, queer), dimension esthétique de nos environnements ou de nos interactions sociales, trajectoires performatives des œuvres, jusqu’aux réajustements subversifs des processus artistiques engageant le public dans un savoir-rire comme savoir-vivre. Nos outils d’analyse croisent les sciences de l’art (esthétique, histoire de l’art, poïétique de l’art), les Sciences de l’information et de la communication, et plus largement sciences humaines et sociales. En particulier, l’équipe ADS met en œuvre des expositions en parallèle avec ses grands colloques, ses journées d’étude, ses tables rondes, ou en partenariat avec des structures locales. Les deux revues d’ADS témoignent de son articulation entre d’une part les questions d’esthétique traversant l’art avec sa revue trentenaire Figures de l’art : Revue d’Études Esthétique (existant depuis 1992) sous format papier et en version numérique sur Persée1 et, d’autre part, les problématiques liées à l’intrication des arts et des technosciences, avec sa toute jeune revue numérique en science ouverte Arts, Sciences et Technologie : Actualités Scientifiques de l’Art ASTASA (depuis mai 2020)2.

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Les principales thématiques d’ADS

Art et numérisation des sociétés

11Si par le passé, l’art s’est fortement rapproché de la science (notamment à la Renaissance) ou de la technologie (notamment avec l’industrialisation à la fin du xixe siècle), il se présente désormais parfois dans une proximité telle avec les technosciences qu’il semble en perdre sa portée subversive, voire simplement critique. Pourtant, la confusion entre l’art et ce qui le déborde (et qu’il cherche à apprivoiser ou à s’approprier) doit tenir compte des ères épistémologiques en jeu. Celle dite du numérique (ou du digital) est distincte de celle des mécaniques industrielles de la modernité comme de celle de la création par les génies universels du regard souverain renaissant, ou encore, bien entendu, de la philosophie antique, distinguant la pensée (scientifique) des hommes libres des actions (techniques) des esclaves (Levy-Leblond). Aujourd’hui, d’une façon inédite, art, science et technologie forment un trio presque trop « parfait » ; cependant, la collaboration entre artistes et scientifiques reste sujette à discussions. Qui de ces deux pères de l’œuvre offrira à sa progéniture son nom ? Bio art, art transgénique, cyber art, net art, mobile art, living art invitent à repenser les relations entre art et science, art et technologie, mais aussi bien la place et les enjeux de l’art, comme la validité d’une approche esthétique qui peine à définir ses critères.

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12L’axe ADS s’intéresse à l’engagement des arts dans les enjeux d’une nouvelle circulation des savoirs entre arts, sciences humaines, sciences techniques, ou encore sciences naturelles. L’art saurait-il jouer le rôle de catalyseur que les humanités digitales espèrent ? C’est en revenant sur les œuvres mêmes, leurs scénographies, les dispositifs qu’elles proposent, gardés par des protocoles établis au frottement de ceux des productions scientifiques, que les chercheurs tentent de mettre en valeur les éclairages offerts par l’art sur notre monde connecté et dématérialisé. A nouveau, l’art relève les problématiques chères à ADS : celles soulevées par l’anthropocène ou le néocolonialisme de la pensée occidentale globalisée. Parfois au plus proche des SIC, l’approche poïétique des œuvres permet de dégager leurs enjeux sociétaux et politiques. Des séminaires (Tunis-Bordeaux-Laval) dans le droit fil des Forum Humanités Transition et Culture Numérique (HTCN) de l’Université de Tunis sont menés en partenariat ; ainsi que des collaborations avec l’Université de Sfax (colloques du laboratoire LLTA et projets de recherche). Les dimensions créative, subversive, critique de l’art en font un moyen de questionnement protensif de nos sociétés.

13Art et action sociale (activisme et design de soi)

14L’Axe ADS se propose d’approcher les interrelations et les articulations contemporaines entre pratiques artistiques (arts plastiques, performances, spectacles vivants, installations interactives, dispositifs processuels…) et actions sociales et politiques. Pour certains observateurs « l’activisme en arts » (« l’artivisme », « l’art en commun », « l’art contextuel », ou encore « l’art d’intervention ») constituerait l’un des apports les plus novateurs de l’art contemporain, en ce début de xxie siècle, abordant, entre autres, les thématiques de l’écologie, de l’altermondialisme, du féminisme, de la consommation responsable, de l’aliénation sociale et économique ou de l’immigration. Cette nouvelle prise de conscience du caractère politique de la création artistique remet en cause les discours consensuels sur la neutralité de l’art et de l’esthétique, confinés dans leur « autonomie » et imperméables aux désordres du monde et met l’accent sur l’éventail de « l’art-design ».

15L’activisme en arts est-il caractérisé par une profonde méfiance, voire un discrédit, à l’égard des « représentations politiques institutionnalisées » du monde de l’art et des sphères d’influence du marché de l’art – des musées, des galeries et des grandes biennales internationales ? Ou bien, malgré l’expression d’une apparente et parfois manifeste contestation, l’activisme en arts alimente-t-il ce monde de l’institution du marché en productions artistiques au contenu politique subversif et est-il, in fine, digéré par l’industrie culturelle (Adorno, Horkheimer, 1983) et les nouvelles économies créatives ? L’activisme artistique est-il happé par ce processus de « marchandisation – spectacularisation » dans un consensus « tout culturel » ?

16La question de l’évaluation de la capacité des champs artistiques (arts plastiques, littérature, performance, théâtre, danse, vidéos, etc.) à fonctionner « en écho » à la protestation sociale et politique est soulevée. L’art peut-il ouvrir une expérience d’un autre futur ? En tenant compte de la dimension planétaire de l’activisme artistique et des spécificités des luttes sociales et politiques, ainsi que des particularités culturelles et artistiques dans différentes ères de civilisation, c’est toute une épistémologie en sciences humaines et sociales (études postcoloniales et décoloniales) par trop « occidentalo-centrée » qui est reposée. Par ailleurs, cette réflexion guide également des questionnements sur les médiations artistiques qui s’inscrivent à la croisée des institutions culturelles, des enjeux des œuvres politiquement engagées, et de leur portée esthétique.

Art et espace urbain (les figures de l’urbanité)

17Cette problématique se propose d’interroger les rapports entre art et territoire physique (territoires humanisés, la ville en priorité). Ces rapports de l’artiste moderne et contemporain au « territoire » sont, pour le moins, multiformes. Tour à tour, l’artiste intervenant en milieu urbain peut endosser le rôle de l’usager du lieu, de l’occupant licite, ou de l’activiste sociopolitique. La ville est analogue à la création artistique moderne et contemporaine, en butte aux démons de l’expansion, du débordement et de l’hyperactivité. Les usages du territoire sont aussi bien transformés par sa numérisation : ville connectée (smart city), ville numérique, qui ont en retour des conséquences sur la perception de nos corps articulée avec l’appréhension de notre vécu, celle de nos façons de faire société, et de structurer à nouveau les pratiques du territoire. Dans cette boucle, l’artiste insère ses propositions à la croisée de la dimension spectaculaire et expérimentale (l’artiste intervient dans le lieu, il n’est plus question de « représentation » – Paul Ardenne 2010) par des rencontres physiques ou des implémentations d’œuvres numériques. ADS collabore ainsi aux recherches inaugurées par la biennale bordelaise Organo Corps et arts visuels (« Body Building. Des Corps urbains » pour l’édition 2023). Aussi bien, il ne s’agira pas seulement d’interroger les œuvres dans la ville mais la façon dont la ville fait art, déploie son esthétique (Shusterman) et ouvre, par l’intelligence critique des artistes, des façons de vivre la ville ou de faire ville. Une nouvelle urbanité. Celle-ci toutefois est réinterrogée avec les transferts imaginés pour des mondes parallèles immersifs et construits : des métavers, par certaines propositions artistiques. C’est alors à la croisée des travaux sur le corps et l’émersiologie (Andrieu), sur la construction esthétique architecturale et sur les enjeux des dispositifs immersifs que pourrait se dessiner un axe de recherche en art – un art intriqué aux modalités et enjeux technoscientifiques.

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18L’axe ADS est co-piloté par Cécile Croce (PU Esthétique et Sciences de l’Art) et Nicolas Nercam (MCF Arts Plastiques).

FOCUS 1

19Fondé sur un premier dépôt ANR, ce projet « Activisme Artistique dans les Suds » est amorcé par 2 colloques “L’activisme artistique et la mondialisation de la scène de l’art (théorie, pratique, paradigme et circulations)”, N. Nercam et M. Bertrand, 3-5 mai 2021, Bordeaux ; Art et Décolonialité (pratique, théorie, paradigme), N. Nercam, M. Bovo, M. Bertrand, C. Ithurbide 26-28 octobre 2022, Bordeaux), une Journée d’études (MSHParis Nord mai 2021) et trois publications : deux numéros de la Revue d’études esthétiques Figures de l’art : « L’activisme artistique » (2022-2023) et « Art et décolonialités » (2023) et un numéro de la revue en ligne SAMAJ (South Asia Multidisciplinary Academic Journal ; 2023). Il propose d’étude des relations entre production artistique et engagement social et politique, dans le contexte spécifique des pays du Sud (Asie du Sud et du Sud-Est, Afrique subsaharienne, Amérique latine, Pacifique) comme modèles d’analyse.

FOCUS 2

20Ce projet d’Encyclopédie Numérique des CouleurS (ENC), porté par C. Croce et R. Turki, s’appuie sur un partenariat fort entre le laboratoire LLTA de l’Université de Sfax et le MICA. Une équipe d’une vingtaine de membres a été réunie, rejointe par un troisième partenaire, NUPPE de l’Université d’Uberlandia, à la suite du colloque Corpo Pintura Cor Fronteira, 6-8 décembre 2021, Universidade Federale de Uberlândia, Brésil. Il s’agit d’un projet éditorial ambitieux, qui propose des entrées par couleur définie, ouvrant sur des approches selon différentes disciplines et proposant des palettes établies en fonction des terrains étudiés. Son objectif est l’étude de ces organisations numériques du savoir et une exploration des repérages culturels, perceptifs et scientifiques de la couleur. Il a fait l’objet d’un dépôt AUF. Au cœur d’un réseau de spécialistes de la couleur, sous le parrainage d’Hervé Fischer, mais aussi de l’organisation technoscientifique du dispositif de l’Encyclopédie en ligne, ainsi que de chercheurs en Sciences du langage, l’ENC inaugure la première version de son site en mai 2023, et développe ses partenariats (Francophonéa ; réseaux internationaux de chercheurs).

Axe COS : Communication, Organisation et Sociétés

21L’axe COS réalise des travaux sur une thématique historique du laboratoire MICA, la « communication organisationnelle ».

22L’équipe édite la revue Communication et Organisation – publiée aux Presses de l’Université de Bordeaux, par Cairn et OpenEditions – fondée en 1992, qui a fêté ses trente ans cette année. Cette longévité et le lourd investissement autour de la revue pour la faire vivre et la développer constituent un élément structurant du travail collectif.

23Les travaux du COS se sont développés au fil des années autour de l’analyse du rôle des pratiques communicationnelles dans les mutations du travail et des organisations, en prise avec le développement des TIC, l’évolution des modèles managériaux, des imaginaires et des idéologies.

24L’équipe s’intéresse plus précisément, avec un prisme communicationnel et critique, à la question des vulnérabilités, des violences numériques, ainsi qu’à celle de la résilience organisationnelle et de la remédiation. La réflexion s’inscrit dans le fil des constats dressés par des institutions internationales comme le programme des Nations Unies pour le développement ou encore le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), ceux d’une montée en puissance des inégalités sociales et des dégradations environnementales qui progressent de pair. Dans ce contexte difficile, se déploient des situations de vulnérabilité, identifiées comme devant faire l’objet d’une prise en charge sociale tournée vers l’inclusion, la remédiation, l’accompagnement. Tout un vocabulaire se met en place qui incite à voir les « publics empêchés », les « éloignés », les « décrocheurs » hier qualifiés d’« exclus » ou de « précaires », ou d’individus « en échec » comme des populations qui doivent trouver ou retrouver le chemin d’une « réinsertion » ou d’une « ré-affiliation » dans des collectifs susceptibles de les soutenir dans leur périple vers une « inclusion sociale ». La recrudescence des nouvelles pratiques d’accompagnement institutionnalisées illustre, pour certains, un souci de « moralisation » du capitalisme ; elles se développent dans l’espace du travail et les organisations, au rythme accéléré des changements organisationnels et de ceux portés par les Technologies de l’information et de la communication.

25Les travaux collectifs de l’axe COS s’interrogent sur ce que peuvent dire les Sciences de l’information et de la communication de cette réalité, notamment dans le champ de la communication organisationnelle. En quoi peuvent-elles décrypter et aider à concevoir, à la fois ce qui se trame dans la sémantique qui accompagne ces mouvements, ce qui contribue à la fabrique des vulnérabilités, mais aussi ce qui se joue dans les dispositifs mis en place, mobilisant des dispositifs de communication et des artefacts techniques, pour leur capacité à « remédier » à ces situations ?

26La place des pratiques et dispositifs de communication dans l’institution de vulnérabilités, leur prise en charge et leurs définitions sont scrutées et analysées, en mobilisant des cadres théoriques qui illustrent un renouveau de la pensée critique, tourné vers les questions éthiques et attentives aux problématiques écologiques contemporaines.

Les objectifs

  • Étudier les pratiques communicationnelles qui rendent « invisible », qui déshumanisent, réifient, celles qui contribuent à développer et à légitimer la marginalisation, la vulnérabilisation, la discrimination – notamment de genre –, et qui sont contraires au développement d’une « vie bonne » (Honneth) ;

  • Identifier les systèmes communicationnels, de contrôle des comportements ou des subjectivités au travail, mettant en jeu une « violence symbolique », un assujettissement ou un désujettissement (Lianos) ou mettant en jeu les libertés fondamentales et qui peuvent apparaître dans les organisations de travail (De Gaulejac, Floris).

  • Comprendre les processus organisationnels et sociotechniques et les phénomènes psycho-sociaux qui servent de terreau à l’apparition de pratiques communicationnelles « inciviles » ou violentes (incivilités, harcèlement…) dans les pratiques organisationnelles, et qui accompagnent des phénomènes de « mal être » individuels ou collectifs.

  • Comprendre comment des pratiques communicationnelles d’accompagnement, de remédiation, d’activisme ou de résistance peuvent permettre de faire face, d’empêcher les situations de vulnérabilisation et de participer à la mise en place de politiques dites inclusives ou de développement.

27Plusieurs moments de partage de la réflexion ont déjà ponctué ce projet, comme en atteste le carnet Hypothèses qui propose un travail collectif autour d’un « Abécédaire des vulnérabilités » coordonné par Elizabeth Gardère, Hélène Marie Montagnac et Nadège Soubiale. https://cos.hypotheses.org/category/vulnerabilites

28Des manifestations scientifiques ont également été organisées :

  • Un colloque international intitulé « Le côté obscur de la communication des organisations », organisé en commun avec le réseau OrgetCo de la SFSIC en 2019, coordonné par Valérie Carayol avec Valérie Lépine et Laurent Morillon.

  • Un webinaire international les 28-29 mai 2020 intitulé « Incivilités au travail, quand les pratiques numériques reconfigurent les formes de civilité et d’incivilité » organisé par Aurélie Laborde et Valérie Carayol.

  • Un webinaire intitulé « Vulnérabilités et résilience organisationnelles et individuelles » le 24 juin 2020, coordonné par Nadège Soubiale ;

  • Un séminaire en 2021 et un webinaire sur les vulnérabilités, les « low tech » et la sobriété numérique, le 21 novembre 2022, coordonnés par Nadège Soubiale ;

  • Un webinaire international sur « L’activisme numérique des jeunes » organisé par Nayra Vacaflor les 17 et 18 novembre 2022 https://cfl-digital.learnworlds.com/

  • Un colloque intitulé « Cybercriminalités : le hacking en toute (il)légalité » organisé par Marlène Dulaurans le 21 mars 2023.

29L’espace méthodologique, considéré comme un espace d’innovation et de création, reste au cœur de la réflexion dans l’équipe. Le souhait de participer à l’élaboration d’un espace réflexif critique maintient un fort intérêt pour la « recherche action » et les méthodologies de recherche participatives et créatives que les membres de l’équipe ont considéré comme un élément important de leurs préoccupations, souhaitant promouvoir une recherche non coupée des préoccupations et savoirs ordinaires des usagers. Le récent colloque international sur les méthodes de recherche « créatives » organisé par Nayra Vacaflor à la MSH de Bordeaux les 16 et 17 juin 2022 en témoigne.

30La rédaction d’un Livre Blanc coordonné par Aurélie Laborde assistée de Delphine Dupré, élaboré avec des professionnels dans le cadre du projet Civilinum en témoigne également tout comme l’HDR d’Aurélie Laborde soutenue en 2022. Nous nous intéressons également à des pratiques émergentes, notamment l’usage pour la recherche des Escape Game, considéré comme un outil d’amplification des dynamiques relationnelles et communicationnelles au sein de groupes, pouvant faciliter leur observation et analyse.

31L’axe COS fut dirigé par Valérie Carayol de 2016 à mai dernier ; à présent, Aurélie Laborde (MCF HDR en SIC) en assure la coordination.

FOCUS 1

32Projet ÆSON pour « Adopter une Education à la SObriété Numérique », Groupe Thématique Numérique de l’Education Nationale (DNE) ; porteur Nadège Soubiale. Ce projet vise à mener des actions de réflexion, d’information et de sensibilisation auprès d’élèves et d’enseignants du secondaire sur les enjeux environnementaux du numérique, en prenant appui sur des travaux de recherche et de veille qui permettront de comprendre les processus informationnels, communicationnels et les usages d’un numérique écologiquement plus responsable et plus sobre dans l’enseignement et l’éducation. Ce projet pluridisciplinaire réunit des chercheurs en SIC du MICA et autres unités de recherche, en sociologie, en informatique, ainsi qu’en psychologie et Sciences de l’éducation et de la formation. Il couvre la période 2023-2025.

FOCUS 2

33Projet CyberNeTic. Porté par Marlène Dulaurans, en partenariat avec la Gendarmerie Nationale, il s’agit d’un projet de recherche-action coopérative. Pour un nombre considérable de citoyens les insultes, les diffamations ou les menaces en ligne constituent aujourd’hui leur quotidien. Internet a favorisé l’expression de violences et multiplié les déchaînements d’agressivité. Toutes les strates de la société sont touchées par la cyber violence, à l’école, à la ville comme au travail.

34Malgré les efforts du législateur et les efforts de prévention le phénomène s’accentue. Le cyber harcèlement est d’autant plus complexe à appréhender du côté des forces publiques que bien souvent les agresseurs sont anonymes, dissimulés derrière des pseudonymes, masqués par des avatars, ont recours à des « brouilleurs » d’adresse IP. Leur identification nécessite un travail d’investigation minutieux par des experts en informatique ; le traitement des plaintes, quant à lui, nécessite une connaissance approfondie des pratiques, qui évoluent au gré des technologies de communication utilisées.

35C’est dans ce contexte particulier que la Gendarmerie Nationale (représentée par la Division du Renseignement Criminel de la Gendarmerie Nationale et la Section Opérationnelle de Lutte contre les Cyber menaces de Gironde) ainsi que l’université Bordeaux Montaigne ont obtenu le financement d’un projet de recherche par la Région Nouvelle Aquitaine en SHS (2020-2024) intitulé CyberNeTic.

36Associant les Sciences de l’information et de la communication à la criminologie, le projet vise à mieux appréhender les cyber violences comme objet de travail, sur lequel de nouvelles expertises doivent se construire. Il s’inscrit dans une dynamique de cyber sécurité et cherche à renforcer les compétences des gendarmes dans l’assistance aux victimes de cyber malveillance.

37Le caractère original de cette recherche vise à se détacher des méthodologies dites « mécanistes » (Clark, 2004)3 du renseignement, ancrées dans des approches empiriques (Bulinge, 2006)4, pour s’appuyer sur les SIC afin de comprendre différemment les processus de construction, de communication et d’usage mis en œuvre dans ces cybercriminalités et d’enrichir théoriquement et méthodologiquement l’objet d’étude en tant que dispositif sociotechnique.

38L’objectif pour le renseignement criminel est de pouvoir faire émerger du sens pour l’environnement stratégique en identifiant la nature des pratiques de cyber harcèlement, les phénomènes d’engrenage qui se démarquent dans la mise en place de ces processus cyber malveillants, les stratégies d’influence et de manipulation empruntées dans les discours de prédation, etc.

39Du point de vue de la méthode, l’analyse de différentes situations de cyber harcèlement - notamment au travers de conversations entre mis en cause et victimes - permet de proposer une interprétation étayée de l’émergence du phénomène social dans différents contextes d’origine (porno divulgation, arnaque aux sentiments, usurpation d’identité, commentaires haineux, piratage de données personnelles, vigilantisme numérique, etc.). La recherche propose également comme livrables à la Gendarmerie Nationale des dispositifs numériques innovants qui renouvellent les méthodologies d’intervention et de prévention en matière de cyber harcèlement.

Axe E3D : ÉTUDES DIGITALES : des Données aux Dispositifs

40Depuis sa création en janvier 2016, l’axe E3D s’inscrit dans une transversalité entre information et communication ; au-delà du grand partage historique interne aux SIC. Dans une perspective de structuration et d’éditorialisation de l’information (historique, informatique, pédagogique, juridique, etc.), les objets scientifiques de l’axe assurent une liaison entre les littératies et les numératies, entre l’activité symbolique et la computation, entre les nouvelles écritures et le monde du calcul. L’axe E3D s’inscrit donc pleinement le champ émergeant des Humanités digitales en relation avec les Digital Studies, les réseaux sociaux, l’informatique ubiquitaire, le Digital Labor, l’étude des corpus, l’usage pragmatique de la datafication (audience, influence, etc.), de l’IA et ses discours d’accompagnement.

Le champ scientifique de l’axe

41Les membres de l’axe se consacrent à l’étude de la mutation des systèmes d’inscription et d’enregistrement des données dans leurs liens aux dispositifs sociotechniques. Avec l’avènement d’un tournant digital dont témoignent les « technologies intellectuelles » et l’algorithmisation du monde, l’axe propose une étude du rapprochement entre document et structuration qui, en venant excéder la relation entre code et langage, relie l’émergence d’un calcul à hautes fréquences à des contextes variés. En revenant sur le partage entre information et communication se dégage ainsi la perspective d’un agir communicationnel pouvant élargir la dynamique de l’inscription au socius par le biais d’un prototypage de nouveaux dispositifs de lecture et d’écriture.

Des activités de recherche autour de trois grandes orientations

De L’Hyperdocument à L’hyperEdition

42Cette transition qui mène dans une perspective d’innovation et de structuration de formats éditoriaux à travers des dispositifs d’expérimentation. La catégorisation des métadonnées et les langages d’indexation permettent de cerner les contextes d’une translittératie. Il s’agit d’appréhender les possibilités offertes par l’hyperdocumentarité dans la perspective d’une science ouverte. Après le concept d’éditorialisation, le concept d’HyperEdition renouvelle les pratiques d’écriture scientifique, les pratiques d’édition critique, les méthodes de traitement des données, les pratiques de commentaire et de publicisation, les formats documentaires, et les modèles économiques. Le tout formant ce que nous appellerons le troisième stade de la grammatisation.

De l’extraction à la présentation des données

43Un tel mouvement s’opère à partir du renouvellement des méthodes d’enquête et d’analyse qualitative et quantitative. D’une interrogation sur les paradigmes théoriques et l’épistémologie des conceptuels afin de rendre compte de la place originale des SIC dans le champ des Sciences humaines et sociales. Plusieurs textes, fruit d’une réflexion partagée furent signés collectivement par des membres de l’équipe. L’équipe E3D s’intéresse à la “mise en données” (datafication) des organisations, des politiques publiques à partir de l’étude des traces. Cette orientation questionne les nouveaux modèles analytiques et les métriques. Il s’agit de revenir, par l’extraction sur les conditions de validité de la médiation algorithmique, mais aussi d’expérimenter de nouveaux traitements des grands corpus (données massives) dans la recherche en SIC. A cet effet, l’Axe a développer une suite logicielle MyWeb et MyDoc.

Intelligence collective distribuée et agir communicationnel

44La mutation des processus communicationnels trouve leurs expressions dans l’évolution du support informationnel. L’hyperdocument forme donc le nexus (Robert Escarpit) d’une production de connaissance pour étudier des façons de dire et des façons de faire actuelles. L’équipe, dans la diversité de ses membres, prend en compte les différentes caractéristiques de la réalité du milieu dans une perspective ouverte à l’anthropologie et à l’imaginaire des techniques utopiques ou dystopiques, à la mutation du monde (écologique, sociaux) à la période de l’anthropocène. Cette orientation comprend un ensemble de travaux relatifs à la définition des Humanités digitales, non limitée à une approche mono-disciplinaire, en relation avec les Digital Studies, les réseaux sociaux, l’informatique ubiquitaire, le Digital Labor, et plus généralement les formes des mutations des publics et des territoires en assumant pleinement une interdisciplinarité.

Une Politique de développement en cours

45Le CorpusLab E3D se présente comme un lieu expérimental dédiée à la lecture/ écriture, il est à la fois un lieu de conservation et de « proservation » qui rassemble la réalisation d’opérations d’enrichissement dans une perspective d’HyperEdition. Cosma est un logiciel de visualisation de graphe documentaire développé par l’axe. Il permet de représenter des fichiers interreliés sous la forme d’un réseau interactif dans un navigateur web. https://cosma.graphlab.fr/

46Le Stieglex : un projet ANR est déposé en 2020, INDEXSEM (Indexation Sémantique), il exploite les potentialités des littératies notamment dans le développement des standards principalement d’indexation, puis d’annotation, ceci au profit d’une lecture critique qui s’ouvre vers des formes de valorisation des médiations pour les chercheurs, thésards, étudiants. Un carnet de recherche participe déjà de ce développement https://hyperedition.hypotheses.org/a-propos

47Une MasterClass est organisée annuellement depuis 2018 en collaboration avec plusieurs équipes de recherche (Dicen, SciencesPo media lab, Grico, Imsci)

48https://mica.u-bordeaux-montaigne.fr/events/masterclass-dnhd4/

49Des journées d’étude organisées par les doctorants Reticulum, https://mica.u-bordeaux-montaigne.fr/events/reticulum-3-rencontres-interdisciplinaires-information-communication-design/

Quelques contrats réalisés

  • Contrat ANR, HyperOtlet (2017-2020), l’objectif du projet fut d’étudier une œuvre, le Traité de Documentation de Paul Otlet, et la tradition francophone et européenne qui lui est associée ; dépasser le modèle de l’édition web augmentée pour permettre l’utilisation d’un outil d’édition scientifique critique qui s’appuie sur un nouveau dispositif numérique : https://hyperotlet.hypotheses.org/

  • Contrat Région, Robert Escarpit Numérique (RENUM – 2018-2021) s’est intéressé aux dispositif éditoriaux de mise en ligne de versions augmentées de textes. Le projet s’inscrit dans une dynamique d’encodage des textes, de production de métadonnées, d’annotation collaborative dans des groupes d’usage, mais aussi de mise à disposition au public dans des logiques d’exposition. https://renum.e3dlab.net/#/portfolio/530/

  • Contrat Région, My Web Intelligence (2014-2016). Le programme a développé un outil d’extraction (crawl), d’archivage, de qualification et de visualisation du Web au service des humanités numériques. Théories des graphes, text mining, théories de l’influence, Logocile est un dispositif de territorialisation et d’analyse des corpus numériques et de cartographie des controverses. http://app.mywebintelligence.net.

  • Programme Fractures corporelles, fractures numériques, 2016-2020 financé par la Maison des Sciences de l’homme d’Aquitaine - 23 chercheurs et 11 laboratoires de recherche impliqués https://fracturesnumeriques.fr/

  • Contrat avec l’IFEF/OIF (Institut de la Francophonie pour l’Éducation et la Formation/Organisation Intergouvernementale de la Francophonie) dans le cadre de l’appui aux innovations et aux réformes éducatives du programme P9 « Innovations, réformes éducatives et enseignement plurilingue : ELAN-PAIRE » (2019).

Un fait marquant en l’honneur de Robert Escarpit

50Un colloque international a vu le jour en septembre 2018, intitulé « Robert Escarpit (1918-2000). Le centenaire d’un pionnier des sciences de l’information ». Le colloque international est revenu sur l’homme et son œuvre afin de souligner ses qualités et son caractère interdisciplinaire. Nous souhaitions poser la question de l’héritage et de la filiation pour les SIC, mais aussi la question de la curiosité et de l’audace qui furent nécessaires pour avancer vers une institutionnalisation de nouvelles approches de la culture de masse et du document (avec le soutien de la Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine – Pessac et les Archives départementales de Gironde – Bordeaux).

51L’axe est dirigé depuis sa création par Franck Cormerais, professeur en SIC.

FOCUS 1 : Hyperhum@in

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52Le programme de recherche Hyperhum@in réunit un noyau dur de chercheurs en SHS et en Sciences du vivant attaché à questionner et à documenter les projets d’ingénierie exploratoire aux frontières de l’humain. Piloté par l’axe E3D du MICA et la chaire Éthiques, Technologies et Transhumanisme (UCL), ce programme de recherche ambitionne de candidater à une ANR en 2024.

53La bio-ingénierie exploratoire comme nous l’entendons ici désigne l’ensemble des travaux de RetD basés sur la convergence des Sciences du vivant et des Sciences de l’ingénieur qui n’ont pas encore été éprouvés empiriquement. Derrière l’hétérogénéité des pratiques de la « bio-ingénierie exploratoire » il semble possible d’observer l’émergence historique d’une communauté épistémique cohérente qui se fonde moins sur un régime de vérité scientifique que sur un régime d’espérance déjà esquissé par la sociologie des attentes ou les « économies de la promesse ». Irradiée pour une grande part depuis les Etats-Unis, c’est à cette communauté épistémique que s’adresse ce programme visant à cartographier ses acteurs et à mettre en lumière les postures épistémologiques et les imaginaires qui la caractérise.

54Ce programme vise par ailleurs à interroger les processus manifestes de naturalisation des idéologies transhumanistes dans l’imaginaire collectif qui concourent à offrir à ces travaux exploratoires une certaine légitimité politique au sein notamment de la controverse de l’anthropocène.

55Il s’agira enfin de questionner l’économie politique propre à la bio-ingénierie exploratoire aujourd’hui massivement financée par les grands et les petits acteurs du capitalisme digital (GAFAM, fond d’investissement, crypto-investissement). Le projet est porté par David Pucheu (MCF en SIC).

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FOCUS 2 : Anaconum

56Le projet ANACONUM vise à développer une méthodologie transdisciplinaire pour l’analyse de corpus en SHS, en se concentrant sur les controverses en ligne. L’objectif est de créer un lieu d’échange pluridisciplinaire. Les chercheurs travailleront sur des études de cas pour tester les théories et méthodologies et la mise à disposition de corpus selon des normes standardisées de l’open science.

57Le projet ANACONUM s’attachera à développer une plateforme collaborative pour l’analyse de corpus en ligne selon les normes Dublin Core et YAML. Le logiciel MyWeb Intelligence, développé par le MICA-Université Bordeaux Montaigne, permet de constituer de grands corpus web, tandis que MyDoc, son interface graphique, facilite le travail collaboratif. L’objectif est, désormais, d’intégrer des fonctionnalités de traitement automatique du langage et de classification de corpus.

58Les dernières avancées en TAL, comme BERT et GPT-3, seront intégrées dans une méthodologie complexe et itérative. Les analyses lexicales, thématiques, infométriques, structurales et de classement automatique de textes seront explorées. Les dialogues pluridisciplinaires autour de l’étude des controverses mettront à l’épreuve les approches hybrides. L’outillage interactif favorisera, enfin, les boucles itératives d’exploration et d’évaluation des hypothèses de travail. Le projet est porté par Amar Lakel (MCF en SIC).

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Axe ICIN : Information, Connaissance et Innovation Numérique

59L’Axe « Information, Connaissance et Innovation Numérique » du MICA a pour objet l’étude des systèmes informatisés d’information et de communication en tant qu’écosystèmes numériques révélateurs et préfigurateurs de mutations sociales, de design de dispositifs informationnels et de stratégies d’acteurs. L’équipe s’est attachée à promouvoir et à animer des réseaux de réflexion épistémologique, des recherches pragmatiques et méthodologiques sur les enjeux et les usages réfléchis des technologies numériques, sur le processus de médiation et de médiatisation des connaissances mais aussi sur la littératie informationnelle des jeunes, des séniors et autres publics (avec méthodes et outils d’analyses éprouvés).

Projet scientifique de l’axe

60Comprendre les mécanismes, les enjeux et usages des Technologies de l’Information et de la Communication, explorer les pratiques et contribuer à l’aide à la décision publique ainsi qu’aux choix stratégiques des organisations en matière de numérique sont les objectifs de recherche développées au sein de l’axe. La démarche scientifique développée autour d’une triple perspective épistémologique, pragmatique et méthodologique, incite les chercheurs à croiser deux approches : celle de la conception et du design des systèmes d’information et de communication numériques et celle de la mutation des pratiques et des processus d’innovation sociale par les technologies, en combinant des méthodes de mesure des impacts et des itérations autour des processus d’innovation technologique et sociétale.

61Les responsables de l’axe sont Vincent Liquète (PR en SIC) et Annick Schott (MCF HDR en SIC).

Cinq thèmes contribuent à cette structuration collective de l’axe :

La Conception, l’édition et la diffusion de documents numériques

62La dématérialisation des supports, la délinéarisation des processus, l’industrialisation de la production documentaire générées par le développement des TIC ont entraîné un profond changement des modèles éditoriaux et de circulation des connaissances. Ce champ de recherche aborde la question des mutations des stratégies de publication, de diffusion et d’usages, aussi bien dans l’approche de l’Information Scientifique et Technique et des industries de la connaissance que dans le contexte élargi du web, dans sa dimension d’espace éditorial et culturel complexe. Considérée dans une perspective communicationnelle, la production documentaire en contexte numérique peut être analysée non seulement du point de vue des dispositifs techniques et des cadres institutionnels et normatifs, mais aussi dans une approche anthropologique qui renvoie aux représentations, aux imaginaires, aux interactions sociales en jeu. Les théories de l’activité et les approches dynamiques par les transactions coopératives permettent d’aborder les régimes de « documentalité » dans leur diversité.

L’ingénierie pédagogique et la littératie du numérique

63La compréhension de l’écart entre les dispositifs prescrits par les concepteurs et leur utilisation dans différents contextes est abordée dans une perspective cognitive, sociale, économique et culturelle. Les chercheurs de l’axe ICIN, à travers des directions complémentaires de recherche, engagent leurs réflexions et leurs travaux dans des questionnements sur les processus d’appropriation des dispositifs et des ingénieries numériques de formation et d’éducation, sur les composantes de l’accessibilité au savoir et à l’appropriation des connaissances via des dispositifs numériques complexes. Leurs méthodes de conception et d’observation des dispositifs d’apprentissage en ligne prend en compte aussi la protension possible, vécue comme une attention à tout phénomène non visible encore en action mais sensible en intention.

64Et plus particulièrement, du point de vue de la réception, les questions de lecture d’écran et d’intelligibilité du document numérique nécessitent une approche qui révèle l’attention, la perception et les apprentissages à partir des documents ou dispositifs divers (par exemple en Fablab, via des robots de téléprésence, ou via des jeux de données ouvertes). Dans ce cas, les analyses portent à la fois sur les dispositifs et leurs usages au cours de l’activité ainsi que sur les littératies multimodales développées par ces mêmes apprenants.

Analyse de politiques publiques : aménagement numérique et innovation dans les territoires

65La question générale de l’articulation dynamique et évolutive entre organisations et dispositifs d’information dans un contexte numérique est un objet d’étude à part entière qui dépasse le seul champ de l’innovation, posant ainsi de façon prégnante la question des enjeux et usages des TIC et d’une manière plus générale, du numérique. Les travaux s’inscrivent dans des contextes tels que la réorganisation universitaire, l’évolution des outils et des méthodes pédagogiques aussi bien dans les pays du Sud, les pays émergents que dans les pays du Nord, la recherche d’outils de gestion du développement durable, du tourisme, des équipements touristiques, ou encore de mutations des métiers – et des corps socio-professionnels – qui voient leurs modalités de management et d’action fortement modifiées par le recours au numérique.

66Au sein de l’axe, outre le repérage et l’analyse de situations professionnelles ou sociales, des chercheurs considèreront le point commun de ces voies et moyens qu’est l’accueil de l’hybridation entre ancien et nouveau système (Tixier, 2002) vers possiblement des rebonds individuels et collectifs. Il s’agit de redonner sens et dignité à l’humain, aux équipes et donc à l’organisation.

67De fait, c’est la notion d’écosystèmes numériques qui est alors mobilisée au sens où l’on considère les phénomènes dans leur relation interactionnelle. Ce terme d’écosystème numérique peut être défini comme un ensemble dynamique, interdépendant et interactionnel composé d’acteurs (créateurs, producteurs, diffuseurs, makers, usagers) et d’artefacts et dispositifs numériques (sites web, réseaux sociaux, plateformes, logiciels).

68Les conférences du réseau international EUTIC et du groupe TIC-IS (labellisé par la SFSIC) ont traité en profondeur de nombreux thèmes de cet axe ; ce réseau a été créé au début des années 2000 par Lise Vieira, professeure émérite d’ICIN.

Les méthodes et outils de mesure de l’usage des systèmes numériques

69Une des forces de l’axe ICIN est le regroupement de chercheurs de formations variées, aux méthodologies et approches complémentaires. La collaboration entre ses membres permet de développer des méthodologies mixtes et originales dans le cadre de ses projets. Ces méthodes sont le support à diverses formations en SIC, école doctorale et autres (master MEEF…).

70Ces méthodes reposent d’une part sur la collecte de données quantitatives (par questionnaires, via les systèmes d’information tels que les learning analytics, ou par l’analyse lexicométrique appliquée à des corpus de documents…) ; et d’autre part, sur la collecte de données qualitatives (issues d’entretiens semi-directifs individuels et groupés, d’observations de situations authentiques situées ou expérimentales…). Dans la plupart des projets de l’axe, ces données quantitatives et qualitatives sont croisées, combinées et synthétisées. Le traitement et l’analyse d’un type de données peut se faire à l’aide d’outils informatiques mais aucun outil ne permet l’articulation entre les différents types de données en vue d’une analyse écosystémique complexe et combinée. Ainsi, des modèles analytiques spécifiques aux besoins des projets et des acteurs enquêtés sont développés.

71Tout en poursuivant les travaux issus de la webométrie qui constituent un modèle d’analyse pouvant s’appliquer à de nombreux domaines en permettant l’analyse des phénomènes utopiques et dystopiques en matière d’information, de documentation et de données ; l’ambition, dans l’axe, est aussi d’explorer des voies d’optimisation de cette nouvelle documentation constituée de datas et d’intrications complexes entre structuration documentaire et culture informatique. Les questions de culture d’information sont également interrogées.

72Par ailleurs, la philosophie progressive de l’axe est de s’engager dans une démarche d’ouverture de données de la recherche, et de valorisation des méthodologie et résultats de recherches en cours, à travers des dispositifs de communication collaboratifs (carnets de recherche sur hypotheses.org notamment, dépôts Humanum…).

L’analyse des idéologies en circulation sociale autour des transitions et mutations avec/par le numérique

73Les idéologies en circulation sociale, afin de dépasser les seules approches centrées utilisabilité, usages, représentations, reprennent l’ascendant dans la société de la connaissance. En effet, à travers les dynamiques, les discours et les modes de structuration de l’information en contexte numérique, il est important d’apporter une approche critique de l’émergence, de la circulation et de la diffusion des idéologies contemporaines au-delà des incidences des politiques et déploiements avec et par le numérique.

74Analyser les idéologies exige de découvrir, décrypter, comprendre et critiquer les structures mythologiques des discours, les catégories des représentations, les constructions du sens des pratiques et des politiques du numérique. L’idéologie a notamment des fonctions de dissimulation, de légitimation de la domination, et d’intégration, en tant que vision du monde.

75Parler d’idéologie autour des transitions numériques et s’ouvrir à une attention sur les intentions protensives perceptibles c’est tenter de décrypter les phénomènes d’information et de communication telles des catégorisations qui structurent discours et actions en lien avec des formes de connaissance.

76De facto, nos questionnements portent sur l’humain et les réseaux. Maître ou objet des réseaux techniques et des réseaux humains, l’humain en situation de risques et d’incertitudes se trouve en tension permanente entre des possibles l’amenant dans un flux, un mouvement mais aussi dans des instants de rétention, d’attente de réflexivité et de résilience. Si l’homme devient, en raison de l’écosystème actuel un « acteur–réseau », il est aussi une conscience, en lien avec un espace plus ouvert encore.

77Nous voulons explorer cela, à la suite des travaux passés sur la complexité et la métamorphose de la conscience d’une science qui ne peut plus être définie uniquement comme un savoir classique (Prigogine, Stengers, 1979).

78Les « intermédiations du savoir » seront un objet scientifique attractif pour certains chercheurs de l’axe. Certains d’entre eux envisagent de creuser encore plus, , la reconsidération de l’humain et des créations artistiques afin de poser un regard critique sur les humanités de demain, numériques incluses en n’omettant pas de distinguer l’impact de la raison systématique (scientificité) croisée à l’intuition et à l’esthétique issue du corps, des émotions et de la conscience (Damasio, 2002) ; ceci nous permet d’envisager également des collaborations internes avec d’autres axes du MICA et externes au laboratoire. Ainsi, en interne, ICIN travaille prioritairement avec l’axe COS sur la sobriété numérique dans l’espace scolaire français, la place de la culture des données (data culture) notamment pour les métiers de la bibliothéconomie et de l’info-documentation avec l’axe E3D, l’émergence de tiers-lieux de la connaissance dans diverses aires géographiques dont l’Afrique avec MSC.

79En matière éditoriale, l’axe ICIN porte un ensemble de collections monographiques comme :

  • « Utopies en information, communication et documentation » – Iste éd., création et direction de Vincent Liquète, professeur en SIC

  • « Labyrinthes » – Presses universitaires de Bordeaux, direction de Lise Vieira, professeure émérite en SIC.

  • « Médiation et médiatisation des savoirs » – Iste éd., co-création et co-direction d’Anne Lehmans, professeure en SIC et Vincent Liquète.

80Plusieurs chercheurs de l’axe ICIN sont membres engagés dans des comités éditoriaux de revues internationales en SIC : Hermès (CNRS éd.), Communication des organisations (PU Bordeaux), ATIC (CNAM et al.), La revue du Gricodd (Collectif franco-canadien), Ecosystèmes numériques (Presses des Mines), Intelligibilités numériques (UTC et U. de Montpellier 3), Management et sciences sociales, Revue Psychanalyse et management… nous permettant de tisser des liens avec diverses unités de recherche du territoire national et au-delà.

81Notre expérience scientifique a permis sur plusieurs années de créer des réseaux scientifiques internationaux donnant lieu à des colloques réguliers et des publications d’actes. Parmi eux, les réseaux TICIS, EUTIC, CIA ou COSSI ont vu le jour et été accompagnés depuis leur création.

FOCUS 1 : L’ANR-SAPS Fablab-More (2022-2024)

82Le projet FABLAB-More, déposé par Vincent Liquète, vise à expérimenter et analyser les potentialités de développement du champ d’action des Fablabs, lieu ouvert au public où sont mis à disposition toutes sortes d’outils et de machines, dans le but de concevoir et de réaliser des objets et des prototypes. Par définition, presque tout peut être fabriqué dans un Fablab à travers l’amélioration de la documentation, de la communication et les processus d’intermédiation, dans des logiques d’ouverture sociale plus que d’innovation technologique experte et à poursuivre et approfondir les investigations entamées autour des tiers-lieux comme espaces participatifs de diffusion des savoirs. Ainsi les dimensions cognitives, sociales et interculturelles en jeu sont mises en pratique à travers des expérimentations auprès des jeunes publics dans un réseau de fablabs locaux et internationaux (approche comparée) puis analysées par des chercheurs experts des questions de médiation des savoirs par/avec le numérique.

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Axe IDEM : Image, Design, Espace, Médiation5

83L’axe Image, Design, Espace, Médiation regroupe des chercheurs qui travaillent sur des objets mobilisés dans des processus de médiation culturelles et/ou communicationnelles, en focalisant l’attention sur leur dimension « contemporaine », intempestive (Agamben, 2012)6. Il s’agit de prendre en considération ce qui déconcerte dans le « contemporain », notamment, son ambivalence, cette sorte de dédoublement entre la persistance, la primitivité, l’archaïsme des choses et leur incertitude, leur actualité, mais aussi les ruptures ou les perturbations qu’elle engendre.

84L’expérience du « contemporain » est approfondie à partir d’une complémentarité des recherches menées, par les membres de l’axe, sur les images et les imaginaires, les usages du design, les arts spatiaux et les lieux urbains, les corps en mouvement, les interventions collectives ou singulières et les discours oraux et écrits, qui peuplent nos environnements sensibles et sociaux. Ces objets sont investigués à partir d’un croisement de regards qui mobilise des orientations et des cadres théoriques différents qui vont de la sémiotique7 à l’esthétique, à l’anthropologie et la sociologie, l’urbanisme, l’analyse du discours et l’histoire. La conjugaison de ces regards se fait à partir d’une approche communicationnelle revendiquée comme commune avec le souci d’un « être et faire ensemble » et l’attachement à des formes et des pratiques de recherche collective, visant des résultats tangibles.

85Cette approche résolument transdisciplinaire et expérimentale vise à articuler systématiquement réflexion théorique et confrontation avec des solides empiriques de référence qui peuvent prendre des formes différentes ; de l’étude de corpus d’images ou de discours, à l’étude de cas ou l’enquête de terrain. L’objectif est d’interroger des espaces communicationnels émergents et existentiels, afin d’ouvrir de nouveaux champs épistémologiques et phénoménologiques dans les SIC. Deux exemples, parmi d’autres, le GER Fans, piloté par H. Breda et M. Bourdaa, (cf. https://www.sfsic.org/la-sfsic/groupes-detudes-et-de-recherche/) et la revue Méthodes visuelles, dirigée par A. Bouldoires et F. Reix, qui est devenue dernièrement une collection des Presses Universitaires de Bordeaux (PUB).

86Au sein de l’axe IDEM, l’organisation du travail scientifique privilégie des séminaires de recherche annuel ou pluriannuel, des rencontres scientifiques et des appels à projet.

87Les séminaires de recherche sont l’occasion pour inviter des chercheurs extérieurs sur des thématiques spécifiques et pour connaître les travaux en cours des chercheurs confirmés et des doctorants de l’axe. Ainsi le séminaire sur Modes de présence à l’ère contemporaine, animé par Alain Mons de 2016 à 2018, qui a abouti à un ouvrage collectif, a sondé les modes de la présence et de l’absence dans les domaines techno-médiatiques, artistiques, mémoriels et urbains8.

88Les rencontres scientifiques nationales ou internationales sont organisées souvent en relation à des projets de recherche. Par exemple, le programme « Graffcity », piloté par A. Beyaert-Geslin, qui s’interroge sur les appropriations urbaines imagées, a donné lieu à un ouvrage collectif9 et un festival de sémiotique en juin 2022. Une journée d’étude à la MSH est prévue en juin 2023 sous le titre Des écritures, des peintures, des murs. Le sens des lieux.

89Les journées scientifiques sont dédiées à des thématiques spécifiques comme par exemple : Ré-enchanter le passé : Patrimoines et transmissions sur le patrimoine immatériel (A. Pécolo, J. de Bideran, M. Mauvoisin et M. Bourdaa, mars 2020), Autour du contemporain sur l’hybridation des pratiques de recherche alimentée par des croisements thématiques, théoriques et statutaires (C. Forthoffer et M. G. Daskalakis, juin 2021), les rencontres Reticulum, associant design et Sciences de l’information et de la communication (SIC), autour de la notion de réseau (F. Harmand et A. Perret, mars 2023).

90La thématique du séminaire de recherche de cette année universitaire concerne l’identité considérée, non pas comme le support de connotations différentes (sexuelles, professionnelles, nationales…) mais comme l’objet d’un processus de dé-identification et de ré-identification qui configure l’identité à la fois comme le présupposé de toute transformation et comme son résultat. Ce séminaire animé par M. C. Manes Gallo, s’articule en trois sous-thématiques qui ont été définies collectivement, à partir des préoccupations des chercheurs de l’axe IDEM.

  • La première sous-thématique concerne la médiation, médiatisation et appropriation du patrimoine. Elle aborde les enjeux liés à la présentification d’un passé ou d’un présent qu’il s’agit de faire revivre, par des formes de communication (scénographie, images, sons…) et des stratégies d’appropriation différentes. Notamment, la restauration à l’identique ou la restructuration à partir des traces du passé, ou la nécessité d’anonymisation des personnes auprès desquelles on recueille des données audio-visuelles ou sonores, dans les recherches de terrain (e.g. gestion des données personnelles, droit à l’image,

  • …).10

91S’inscrivent dans cette thématique les travaux de C. Badulescu sur les projets collaboratifs de médiation numérique dans les musées et de D. Trouche sur « les mises en scène de l’histoire » interroge les sites de guerre, les mémoriaux. Le projet Fabcom, piloté par A. Bouldoires et A. Monseigne, à partir d’une analyse communicationnelle de l’innovation sociale, vise à développer les pratiques éditoriales institutionnelles existantes en les alimentant des expériences issues des médias citoyens de Nouvelle-Aquitaine et des médias populaires d’Amérique latine (Argentine). Un forum citoyen international, réunissant des collectifs français et argentins qui réalisent des journaux citoyens indépendants, a eu lieu à la Maison des Sciences Humaines de Bordeaux en mai 2023.

  • La deuxième sous-thématique autour de l’identité concerne le prendre soin en tant que relation qui peut concerner le domaine de la santé mais aussi la question de l’exclusion et de la norme, de la vulnérabilité des identités et de leur (ré)valorisation dans une relation (comment faire valoir ce que l’on est, comment se faire entendre…). Plusieurs jeunes chercheures s’intéressent à ce thème. Notamment, F. Drillaud qui travaille sur le « faire » des soins palliatifs et sur l’identité de ces unités de soin, L. Pottier qui s’intéresse aux apports du design dans le quotidien des « aidants » et C. Forthoffer qui étudie les enjeux inclusifs du design collaboratif dans la démocratie locale.

92S’inscrit dans cette thématique aussi le projet SEXTEENS, piloté par M. Bourdaa sur les représentations genrées véhiculées par les séries télévisées et leur rôle sur la perception des sexualités et les pratiques des adolescentes et adolescents aquitains. L’objectif est de mettre en place des outils de prévention et d’information.

  • Enfin, la troisième sous-thématique concerne les frontières en tant que territoires et cycles de vie. Dans ce cadre, l’identité est reliée aux notions de « sentiment d’appartenance », d’« errance identitaire », d’hybridation des identités. Se rattachent à ce thème les travaux de M. Bahuaud et A. Pecolo sur les identités générationnelles et de C. Destal sur les appartenances géographiques et sociales. La question des frontières peut acquérir à la fois une dimension spatiale et une dimension temporelle, et se présenter au niveau individuel ou au niveau collectif.

  • Le projet Semioverse, sémiotique des « mondes numériques », piloté par L. Chatenet et financé par la MSH, propose une démarche exploratoire qui entend aborder l’espace numérique actuel (internet, réseaux sociaux, jeux vidéo) comme le terrain d’une sémio-anthropologie visant à étudier les modalités de socialisation au sein des « mondes » dit « immersifs ». Deux journées d’étude/workshop ont été organisées, en novembre et en décembre 2022.

  • Dans le cadre des projets transversaux portés par la MSH (axe Humanités évolutives), S. Cardoso a organisé en 2022-2023 une série de séminaires sur “Design et anticipation” (cf. encadré). Avec le dispositif LID qui permet la création de scénarios pédagogiques pour la conception de formes d’apprentissage collaboratives, S. Cardoso a développé deux études. La première, menée en collaboration avec les STAPS, concerne une étude sur la charge cognitive lors de la réalisation de tâches pédagogiques, tandis que le deuxième concerne un projet pédagogique collaboratif avec l’Université de Montréal, Paris Saclay et Paris Telecom. En 2023, nous avons développé un projet Région, sur la thématique : favoriser la réussite étudiante et développer des espaces d’innovation pédagogique.

  • L’axe IDEM est actuellement coordonné par M. C. Manes Gallo, professeure en SIC.

FOCUS 1

93Dans le cadre des projets transversaux portés par la MSH (axe Humanités évolutives), S. Cardoso a organisé en 2022-2023 d’une série de séminaires sur “Design et anticipation”. Les études en prospective ont été adoptées avec empressement par les équipes de direction et départements de planification dans les organisations, institutions et nations du monde entier à la suite de multiples évènements : attentats du 11 septembre, catastrophes nucléaires telles que Fukushima, pandémie du COVID 19, etc. Des acteurs majeurs très minoritaires contribuent à construire une réflexion scientifique applicable dans des situations de crise.

94Riel Miller à l’Unesco a joué un rôle déterminant dans la création de nouvelles chaires Unesco, avec Roberto Poli à l’Université de Trente, en Italie, Markku Wilenius à l’Université de Turku, en Finlande, et Sohail Inayatullah à l’Université de Sains Islam, en Malaisie. Parmi les approches proposées, relevons la recherche par l’action participative (Inayatullah, 1997).

95Dans la volonté de projeter ses visions du monde et ses manières de l’habiter, le design est un moyen d’ouvrir de nouvelles perspectives autour du futur et d’explorer collectivement l’avenir en matérialisant des scénarios fictionnels pour ensuite les mettre en débat. Ces scénarios peuvent passer par de la création d’artefacts, de services ou d’expériences…

96Les designers Dunne et Raby (Royal college, 1999) cherchent par exemple à construire un environnement qui permettrait aux designers de questionner davantage l’impact de leurs conceptions sur la société. Les anticipations studies (début des années 2000 aux USA) examinent les comportements anticipatifs, c’est-à-dire un comportement qui « utilise » le futur dans son processus décisionnel réel.

97D’où la question de comment différents types de systèmes examinent les risques et les pratiques d’anticipation ? La revue de la littérature propose six axes d’action (Inayatullah 2008) : Cartographier l’avenir, Anticiper l’avenir, Timing the future, Approfondir l’avenir, Créer des alternatives, Transformer l’avenir.

98Les séminaires sur “Design et anticipation” proposent de construire un cadre conceptuel pour appréhender, préparer et comprendre le futur, l’approche est orientée sur la recherche projet et vise à croiser les regards d’institutions publiques/ privées et scientifiques. La question à laquelle on souhaite répondre est comment les SIC et les SHS contribuent-elles à agir dans des situations instables ou de crise, par exemple dans les cas de l’alimentation, l’énergie, l’environnement, le vieillissement, le nucléaire, les transports ?

99Pour contribuer à ces recherches sur les humanités évolutives, des appels à projet de la MSH ont été lancés fin 2022.

Axe MSC : Médias, sociétés et cultures

100L’axe de recherche médias, sociétés et cultures est formé par une équipe pluridisciplinaire que l’analyse sociopolitique des médiations médiatiques et de l’information et des représentations médiatiques a réunie. Représentations, réception, pratiques médiatiques, pratiques professionnelles, publics, technologies numériques, genre, changement social, engagement, développement sont autant de thèmes abordés par les travaux des membres. Quatre logiques ou champs majeurs fédèrent cependant les membres dans une dynamique à la fois transversale et autocentrée, autour de la trilogie : Inclusion, Transition, Protension, mais avec une dominance variable de chacune d’entre elles.

Socio-histoire des médias

101En s’appuyant sur la notion de transition (réinvention, résilience, mutation), les travaux de cet axe ont deux orientations. Une partie des recherches se centre sur l’histoire des moyens d’information dans une perspective généalogique en retraçant les contextes sociopolitiques et technologiques de leur émergence, de leurs mutations et de leurs pratiques. Le versant sociologique étudie les représentations et les pratiques médiatiques, les modèles économiques des médias, les mutations et reconfigurations de la réception et des publics. Actuellement, deux projets autour de l’analyse des représentations des discours médiatiques et de l’étude des pratiques informationnelles structurent cet axe. Le projet Région Nouvelle Aquitaine « Communication et construction de l’opinion sur les jeunes migrants isolés » analyse la fabrique de l’opinion publique sur les questions des jeunes migrants à travers l’étude de la couverture médiatique de ce sujet. Il s’agit de décrypter précisément les représentations véhiculées par les discours médiatiques sur la question de la migration et d’étudier la réception de ces discours par les citoyens, les acteurs impliqués dans ces problématiques et par les jeunes migrants eux-mêmes. Le second projet « Pratiques informationnelles des acteurs du développement en Afrique » en partenariat avec l’Agence française de Développement, qui couvre dix pays de ce continent, repose sur le présupposé selon lequel les médias et autres Technologies de l’information et de la communication participent fortement à la maturation de pratiques informationnelles, au traitement, stockage, diffusion et valorisation de l’information. Ce projet vise à explorer les pratiques informationnelles de façon à comprendre les stratégies de veille informationnelle mises en place sur le terrain par les acteurs du développement. Il s’agira notamment de s’interroger sur la façon dont le numérique influence leurs pratiques informationnelles.

Pratiques journalistiques

102Les mots clés histoire, sociologie, représentations, pratiques professionnelles et mutations caractérisent les travaux de ce thème. La dynamique de ce pôle, également centré sur la transition, se structure autour de quatre démarches.

103La première se centre sur la formation des journalistes, la répartition genrée du pouvoir au sein des entreprises de presse et la mise en discours journalistique de la santé mentale. Elles portent par ailleurs sur les vulnérabilités des journalistes, en interne, au sein de leur entreprise de presse. Il s’agit de comprendre comment la pratique professionnelle et notamment les contraintes organisationnelles, plus ou moins imposées par un système hyperconcurrentiel, l’ultra-polyvalence, l’augmentation de la charge de travail… peuvent entrainer, chez les journalistes, une perte de la désirabilité du métier et ainsi impacter leur santé. Cette recherche s’articule en priorité autour du risque organisationnel (Davezies 2004). Dans un premier temps, l’étude a concerné des journalistes en activité.

104La deuxième démarche s’organise autour des figures illustres du journalisme, notamment celles des éditorialistes, qui restent attachées à une longue tradition au sein de l’histoire de la presse écrite en France. Les recherches abordent tout d’abord la question dans une perspective historique, s’intéressant à la façon dont la fonction d’éditorialiste a été confiée dès ses origines à des journalistes-écrivains ou à d’autres intellectuels de renom sans oublier les hommes politiques qui se sont servis du genre éditorial comme tribune d’opinion, puis comme tremplin dans leur ascension vers le pouvoir [Delporte, 1999, Buxton et James, 2005]. Les recherches observent ensuite les éditorialistes d’aujourd’hui afin de comprendre l’incidence des changements survenus dans cette catégorie particulière de journalistes.

105Dans cet axe de recherche, il est par ailleurs question de mutations des pratiques journalistiques sous l’influence des technologies avancées (les algorithmes dans le secteur du journalisme, l’observatoire de l’Intelligence artificielle en Afrique) en mobilisant la protension (anticipation, émergence, innovation, créativité). Ces travaux prennent appui sur le projet « ALGO-J. Exploration de la place et du rôle des algorithmes dans la pratique journalistique » qui est financé par la Région Nouvelle-Aquitaine pour trois ans (voir encadré). Mais cet axe analyse également les identités journalistiques en mutation, notamment en lien avec les questions d’engagement et de militantisme dans les médias.

Les effets des médias, de la culture et de l’éducation sur la circulation et la réception du féminisme

106Cet axe de recherche s’articule autour de l’Inclusion (altérité, diversité, vulnérabilité, activisme) en s’appuyant sur deux projets en cours : « Les appropriations du féminisme par les étudiant·es : le rôle des médias, des biens culturels et des réseaux sociaux », financé par la Région Nouvelle-Aquitaine, et « Généalogie et circulation transnationale des idées féministes matérialistes (Espagne-Argentine-France-Suisse romande) » ayant obtenu le concours de l’IUF. Les travaux recontextualisent le rôle des médias dans d’autres pays où la presse a contribué à la politisation dans l’espace public des violences faites aux femmes et à l’émergence du terme de féminicide (comparaison France-Italie-Argentine). Ils renseignent également les contenus médiatiques et culturels dont la diffusion participe de la socialisation au féminisme pour travailler sur ces figures dans la BD, la littérature jeunesse, les séries et les jeux vidéo à destination des 15-25 ans. L’apport spécifique consiste à lier la sociologie des mobilisations à celle des appropriations des médias et de la culture dans la diffusion des idées féministes et leur réception auprès des jeunes générations en imbriquant l’histoire sociale des idées, la socio-histoire de la réception et les Cultural Studies féministes.

Les usages sociaux des nouvelles technologies

107Le dernier axe de recherche cible les Technologies de l’information et de la communication dans une perspective sociopolitique. Les recherches interrogent leurs usages sociaux et scrutent leur contribution dans les processus de développement socioéconomique et culturel, notamment dans les pays des suds. Inscrits pour une grande partie dans les travaux de la chaire Unesco « Pratiques émergentes en technologies et communication pour le développement » (voir présentation). Les recherches en cours analysent les technologies avancées en mobilisant la protension dans une perspective communicationnelle pour le développement.

108L’axe MSC est coordonné par Etienne Damome, professeur en SIC.

FOCUS 1 : projet ALGO-J (2021-2023)

109Piloté par Rayya Roumanos, maitresse de conférences à l’Institut de Journalisme Bordeaux Aquitaine et membre du MICA depuis septembre 2015, le projet Algo-J est consacré à l’étude de la place et du rôle des algorithmes numériques dans le secteur de la presse, à l’échelle régionale. Il comprend trois visées qui répondent à divers enjeux liés à la présence massive et structurante des algorithmes dans l’écosystème informationnel : celle, d’abord, d’étudier l’influence de ces actants technologiques sur les écritures journalistiques. Celle, ensuite, de mesurer le niveau d’acculturation des journalistes à la logique algorithmique qui charpente leurs horizons de production de l’information. Celle, enfin, de mettre en œuvre une méthodologie à mi-chemin entre l’exploration scientifique et l’investigation journalistique pour enquêter sur les algorithmes présents dans tous les domaines de la vie privée et publique.

110Algo-J s’inscrit dans la lignée des travaux sur le « tournant algorithmique » (Napoli, 2014) dont l’impact est particulièrement prégnant dans le secteur de l’information, tant au niveau technique et procédural qu’au niveau culturel (Striphas 2015). Le projet comprend une dimension exploratoire qui vise, d’une part, à analyser les modes d’appropriation et de compréhension par les journalistes des pratiques et des enjeux liés à la révolution algorithmique, et à développer, de l’autre, des protocoles d’enquête journalistique autour des algorithmes. Il entend, également, articuler recherche et enseignement au travers de la mise en place d’une plate-forme participative composée des ressources scientifiques et pratiques destinées à favoriser la compréhension du fonctionnement et de l’impact des algorithmes numériques dans un contexte de big data.

111Cette recherche dont la phase régionale s’étend sur 24 mois s’appuie sur un ensemble de projets menés par l’équipe d’Algo-J autour des innovations éditoriales et de la littératie numérique, dont un projet consacré à la création d’un outil de gestion de contenus en ligne, le projet COSMA développé par l’axe E3D du MICA. La recherche bénéficie également d’un réseau de partenaires fortement concernés par cette thématique et très actifs dans le domaine de l’innovation éditoriale. Parmi eux, le Groupe Sud-Ouest dont les journalistes participent à la co-construction d’une méthodologie d’enquête sur les algorithmes en vue de concevoir une plate-forme à visée pédagogique, et l’association NACSTI à travers son média Curieux ! qui constitue un terrain d’étude privilégie pour analyser l’influence des algorithmes sur les modes de production et de circulation de l’information.

112Algo-J peut aussi compter sur la collaboration du Clemi et de Reporters Sans frontières, très investis dans des actions de sensibilisation au pouvoir des algorithmes dans l’écosystème informationnel.

FOCUS 2 : la chaire Unesco « Pratiques émergentes des technologies et communication pour le développement » de l’Université Bordeaux Montaigne

113Dans la lignée des travaux sur l’Afrique menés à Bordeaux notamment par André-Jean Tudesq et Annie Lenoble-Bart, la chaire Unesco « Pratiques émergentes en technologies et communication pour le développement » actualise la recherche sur l’Afrique en s’intéressant au numérique classique et à des enjeux nouveaux et peu abordés en SIC comme les objets connectés, l’intelligence artificielle, les technologies aérospatiales, la collaboration système-humain. Elle s’appuie sur un réseau de membres associés répartis dans différents pays notamment la Côte d’Ivoire, l’Espagne, le Costa Rica, le Mexique, le Kenya, le Congo et le Togo.

Une forte collaboration avec les institutions nationales et internationales

114La chaire Pratiques émergentes des technologies et communication pour le développement est devenue le principal lieu d’expertise du programme universalité d’internet en Afrique. L’accent est mis ici sur l’internet puisque cet outil bouleverse sans cesse l’accès à l’information, les modes d’expression, ainsi que les nombreux aspects liés à la gouvernance et à la vie économique de ses utilisateurs. La chaire Unesco a ainsi développé une expertise dans l’évaluation de la complexité du développement de l’internet et de son impact. Les études menées respectivement au Bénin (2019), au Niger (2020), en Côte d’Ivoire (2022) en République démocratique du Congo et en République du Congo (2023) sont spécifiques de par leur démarche et les résultats obtenus. Elles ont été réalisées sur un mode participatif avec une quarantaine de personnes représentant l’écosystème numérique de chacun de ces pays et ont permis de :

  • Présenter une compréhension claire et concrète de l’environnement et des politiques nationales de l’internet ;

  • Analyser les lacunes et les réalisations à la lumière de la mesure des indicateurs contextuels dans le pays ;

  • Élaborer des recommandations politiques et des initiatives pratiques.

115Toujours dans le cadre de sa coopération avec les institutions internationales, cette Chaire Unesco a développé des travaux sur les pratiques informationnelles des acteurs du développement (en collaboration avec l’Agence Française de développement) et sur les pratiques informationnelles des acteurs de l’intelligence artificielle (avec l’appui de l’Agence universitaire de la Francophonie). Ce dernier projet a abouti à la création d’un Réseau de recherche francophone sur l’intelligence artificielle qui regroupe déjà une trentaine d’universités. Afin de mener ses travaux, la chaire Unesco a bénéficié de l’appui de l’Unesco, de l’Organisation internationale de la Francophonie, de l’Agence Française de développement, du Ministère français de la culture, du Groupe Thalès, de l’Agence universitaire de la Francophonie, d’Orange, de la Région Nouvelle Aquitaine, de la Mairie de Bordeaux et de la Fondation Antony Mainguéné.

L’intelligence artificielle au cœur des travaux de la chaire

116L’intelligence artificielle est au centre des préoccupations de la chaire, ceci parce qu’il s’agit d’un domaine en constante évolution et qui change radicalement notre façon de vivre et de travailler, avec des conséquences imprévues sur la société, y compris la perpétuation des biais sociaux, le renforcement de la discrimination, et l’augmentation des inégalités économiques et sociales. Après s’être longtemps intéressée aux différents usages de l’intelligence artificielle en Afrique et dans les pays en développement, la chaire se focalise sur la façon dont l’intelligence artificielle pourrait contribuer à l’équité sociale. Elle développe ainsi une réflexion sur les biais algorithmiques, la gouvernance des données, la discrimination algorithmique, la découvrabilité, le renforcement des compétences, l’explicabilité, la responsabilité, la confiance, la transparence, la frugalité… Le concept de l’équité sociale dont il est question ici, renvoie à la promotion d’une société démocratique, saine, sûre et juste, fondée sur l’intégration sociale et la cohésion, qui respecte les droits fondamentaux et la diversité culturelle, assure l’égalité entre hommes et femmes et combat la discrimination sous toutes ses formes. Elle renvoie à l’égalité des droits et des devoirs de base pour les citoyens et une possible acceptation d’inégalités socio-économiques que si et seulement si elles engendrent des avantages pour tous en particulier pour les plus défavorisés (Rawls, 1987).

Une revue et un challenge pour valoriser la recherche

117Parmi les réalisations de la chaire Unesco figurent la création de la revue « Communication, technologie et développement » et l’IA Challenge.

118Communication, technologies et développement est une revue scientifique internationale et interdisciplinaire en ligne, orientée vers des problématiques portant sur la circulation des idées, le partage des savoirs, l’expression des identités individuelles et collectives. Elle se veut un espace de dialogue scientifique où se côtoient les recherches menées dans l’espace francophone et celles issues d’autres aires linguistiques. Si la langue principale reste le français, la revue s’inscrivant dans la logique de la diversité culturelle accepte des articles inédits en allemand, anglais, swahili, espagnol, portugais… Une attention particulière est portée aux mutations socioprofessionnelles, aux innovations technologiques en lien avec le développement économique et social. À ce jour, 12 numéros ont été publiés et la revue compte plus de 50 000 lecteurs par an.

119L’IA challenge, concours de webdocumentaires à réaliser sur l’intelligence artificielle (IA), et qui s’adresse aux étudiants des établissements africains d’enseignement supérieur publics et privés vise à encourager les étudiants à valoriser les initiatives locales en matière d’IA et à les amener à interroger les compétences, les politiques, les réalisations et les réflexions liées à l’émergence de l’IA dans leur pays, région, localité. La deuxième édition a occasionné plus de 20 000 votes en ligne.

Bibliographie

La chaire est portée par Alain Kiyindou, professeur en SIC.

Notes

1https://figuresdelart.fr/

2https://www.astasa.org/

3  CLARK Robert M., Intelligence Analysis, a Target Centric Approach, CQ Press, 2004, 432 pages.

4  BULINGE Franck, Le cycle du renseignement : analyse critique d’un modèle empirique, Marketing et Communication, vol. 3, no 3, 2006, pp. 36-52.

5  Mots clé : image, design, médiations, expérience, contemporain, subjectivité, interdisciplinarité.

6  Agamben G., 2012. Qu’est-ce que le contemporain ?. In : Giorgio Agamben : Nudités, Éditions Payot-Poche, p. 20-25.

7  En juin 2024, le congrès de l’Association française de sémiotique se tiendra à Bordeaux à l’IUT de Bordeaux.

8  Mons A. (Dir.), 2022. Présence/Absence : Les battements du contemporain, PUB, Bordeaux, pp.220.

9  Beyaert-Geslin A. (Dir.), 2022. Sémiotique et écritures urbaines, Presses de la MSHA, Bordeaux, pp.300.

10  Manes Gallo M.C. (Dir.), 2018. Identification de … /Dé-identification: entre traces et fictions, PUB, Bordeaux, 272 p.

Pour citer ce document

Vincent Liquète, Etienne Damome, Valérie Carayol, Franck Cormerais, Cécile Croce, Alain Kiyindou, Maria-Caterina Manes-Galo, Nicolas Nercam et Catherine Pascal, «Le MICA : une unité de recherche au carrefour de l’information, la communication, les médiations et les arts», Les Cahiers de la SFSIC [En ligne], Collection, 19-Varia, DOSSIER LABO,mis à jour le : 17/04/2024,URL : http://cahiers.sfsic.org/sfsic/index.php?id=1010.