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HOMMAGES
Louise Merzeau, directrice adjointe du laboratoire DICEN-IDF
Texte intégral
1J’ai rencontré Louise en 2010 à la fois comme rapporteur de son jury d’HDR et en tant que représentante de l’équipe de Nanterre qui souhaitait se rapprocher du pôle que constituait déjà le CNAM et l’Université de Marne la Vallée. Avec Robert Damien qui assurait une sorte d’intérim de l’équipe info-com de Nanterre alors en difficulté, elle a conduit les discussions menant à la constitution de notre unité de recherche commune.
2Louise a tout de suite constitué pour le laboratoire une force d’attraction essentielle. Son investissement dans la vie intellectuelle, qu’elle avait notamment développé à travers les cercles de la médiologie, lui permettait de faire des liens très stimulant entre les enjeux sociétaux du numérique et les problématiques scientifiques. Ses prises de parole lors de nos séminaires étaient la plupart du temps lumineuses ouvrant des pistes de réflexions et d’échange très stimulants.
3Son rapport aux étudiants et aux collègues était également très précieux. Louise était une personnalité dont l’abord initial n’était pas forcément facile tant son exigence intellectuelle et éthique était grande. Mais une fois le contact établi, les échanges étaient d’une grande richesse et d’une grande générosité. Louise tirait toujours ses interlocuteurs vers le meilleur d’où ce rôle de « mentor » qu’elle a joué pour plusieurs mastérants, doctorants et collègues.
4Au fil du temps, Louise la médiologue est devenue Louise la chercheuse renommée en sciences de l’information et de la communication. Je crois que nos échanges comme ses responsabilités au sein du laboratoire y ont contribué. Nous partagions plusieurs notions : le transmédia, le milieu numérique, les liens entre éditorialisation et documentarisation… Elle m’avait sollicité plusieurs fois pour que je publie dans la collection qu’elle avait créée à Nanterre avec Lionel Barbe sur ces problématiques.
5Louise était devenue une référence de premier plan dans la communauté scientifique en SIC. J’ai pu mesurer, à l’occasion des échanges au sein de la conférence des directeurs de laboratoire en SIC (la CPDirSic), comme lors des manifestations organisées par notre société savante, la SFSIC, à quel point elle était devenue une chercheuse essentielle dont les avis étaient toujours écoutés avec une grande attention, respectés, discutés.
6Mais tout en étant une intellectuelle de premier plan, Louise était un « maker » ou plutôt une « makeuse ». Sans doute en lien avec son talent exceptionnel d’artiste photographe, elle allait jusqu’au bout des choses avec un sens de l’esthétique aigu et un souci exemplaire du détail. Son blog en est un exemple typique. Je le donne souvent en exemple de ces dispositifs typiques de l’expressivité des humanités numériques, qui permettent de nouvelles mises en valeur de sa production scientifique en complément des supports de publication traditionnels.
7En même temps qu’une makeuse, Louise était douée d’un très grand sens du collectif et ne rechignait jamais à prendre des responsabilités collectives. C’était déjà le cas dans les cercles de la médiologie, mais aussi dans son investissement associatif, en tant qu’enseignante responsable de l’équipe pédagogique de Nanterre et en tant que chercheuse directrice adjointe de Dicen. Dans l’équipe de direction que nous composions avec Christian Bourret, directeur adjoint pour Marne-la-Vallée, cette qualité en faisait une collègue d’une valeur inestimable.
8Par exemple, après avoir douté un temps de la pertinence de la réorganisation du laboratoire Dicen-IDF que nous avons initialisé en 2016 pour susciter la transversalité et donner plus d’autonomie aux jeunes chercheurs, elle en était devenue ardente défenseuse. Elle a contribué activement à la rédaction du rapport d’évaluation du laboratoire pour l’HCERES qui a eu lieu le 10 novembre 2017, malheureusement sans elle, en ne comptant pas ses heures. Au moment de son décès, notre document partagé était encore rempli de ses annotations… comme une forme de preuve par l’exemple de permanence de la présence numérique qu’elle théorisait si bien.
9Cette générosité extrême de Louise dans l’effort collectif aura sans doute en partie contribué à son brusque décès tant elle semblait fatiguée, quelques semaines avant son hospitalisation, par le surcroît d’effort qu’imposent les désorganisations chroniques de nos institutions. Nombreux sont les universitaires en burn-out, les conséquences en sont parfois terribles… Son moral d’acier et l’intensité de ses productions n’en étaient pas affectés mais l’épuisement était souvent au rendez-vous.
10À Dicen, conformément au testament numérique de Louise, nous prolongerons l’hébergement de son blog et de ses photographies numériques qui rappellent sa très grande créativité. Ils feront partie d’un « Centre virtuel Louise Merzeau » dont le contenu reste à préciser et dont l’ébauche est déjà en ligne, accessible à partir du site du laboratoire. À travers cette initiative la direction du laboratoire, Christian Bourret, Marta Severo et moi-même et tous les collègues enseignants-chercheurs et doctorants de Louise, nous témoignons de leur désir de prolonger son travail si original sur les évolutions numériques des documents, des archives et de la mémoire, à la croisée de la recherche scientifique et des prises de positions sociales et politiques.
Pour citer ce document
Quelques mots à propos de : Manuel Zacklad
Directeur Dicen-Idf