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QUESTIONS DE RECHERCHE

Pierre Mœglin

Séminaire industrialisation de la formation
Contribution à une histoire de la notion d’industrialisation de la formation

Article

Texte intégral

1Le Séminaire « Industrialisation de la Formation » (Sif) tiendra une séance ouverte dans le cadre du congrès de la Société Française des Sciences de l’Information et de la Communication, à Toulon, le 6 juin prochain de 14 heures à 16 heures Les échanges y seront consacrés à l’histoire et à la genèse de la notion d’industrialisation appliquée à l’éducation, à l’occasion d’une anthologie en préparation composée de 21 textes publiés entre 1913 et 2012. Dans cette anthologie chaque texte est présenté et commenté par un ou plusieurs participants du collectif formé de vingt participants et anciens membres du Sif et de trois chercheurs associés à ses travaux de longue date. L’ouvrage paraîtra à la fin de l’année 2014.

2À l’origine de ce projet, il y a près de quatre ans, un constat : celui de l’ignorance de la question de l’industrialisation éducative par un grand nombre de spécialistes de l’enseignement, des outils et médias éducatifs, de la communication et des industries culturelles en général. Surprenante surprise, en effet, lorsqu’ils découvrent que les termes « industrialisation » et « éducation » peuvent être accolés ! Plus surprenante encore, leur surprise lorsqu’ils s’aperçoivent que la formule « industrialisation de l’éducation » ou son équivalent – qu’à tort ils tiennent pour un oxymore récent – figure en fait déjà, il y a plus de cent ans, chez de nombreux théoriciens et experts états-uniens, canadiens et même français.

3Du constat de l’oubli actuel des anciennes tendances industrielles en éducation et de la surévaluation corrélative des tendances nouvelles découlent d’emblée deux objectifs : premièrement retracer la dynamique du projet industriel depuis son origine ; deuxièmement en reconstituer le paradigme ainsi que les diverses et successives concrétisations. Tel est le premier but du projet dont les prémices et les grandes lignes seront exposées lors de la séance de Toulon : proposer une approche compréhensive et critique des mutations industrielles du système éducatif à travers ce que des experts reconnus en disent à des époques différentes.

4Au-delà des chercheurs travaillant sur l’histoire des technologies et des industries éducatives, cette séance intéressera ceux qui s’attachent à la question de la médiatisation et à l’approche communicationnelle des organisations d’enseignement. Y seront également abordés des problèmes plus généraux d’économie politique critique et des questions méthodologiques et épistémologiques liées à l’analyse historique du patrimoine théorique de notre discipline.

5La séance sera divisée en deux parties : la première sera consacrée à l’évocation de plusieurs de ces textes par ceux qui en assurent la présentation et la mise en perspective dans l’anthologie ; la seconde partie s’ouvrira à une réflexion sur l’histoire de la notion d’industrialisation. Les échanges s’appuieront sur le texte introductif de cette anthologie, qui sera mis à la disposition des participants.

6Ce texte comprend deux volets. Sous le titre « le poids des préjugés », le premier dénonce et démonte cinq idées reçues faisant obstacle à une pensée claire de la question de l’industrialisation éducative. Ces idées couvrent le spectre qui va du postulat de l’incompatibilité entre organisation industrielle et institution éducative, passe par la sous-évaluation systématique des réalités industrielles de l’éducation, inclut le refus de considérer ces réalités dans leur pluralité, s’étend à l’idée que cette industrialisation s’imposerait partout sans rencontrer d’objection, avant de déboucher sur le postulat (inverse du premier) de l’inéluctabilité d’une révolution industrielle des manières d’enseigner et d’apprendre. Ainsi, depuis la croyance en l’impossibilité de toute industrialisation éducative jusqu’à la certitude de son omniprésence, ce volet passe-t-il en revue cinq attitudes répandues dont, fort de sa neutralité axiologique, il montre quelles idées reçues les sous-tendent et pourquoi ces idées sont fausses.

7Consacré aux dispositions méthodologiques guidant la sélection et l’interprétation des 21 textes retenus, le second volet (« les conditions d’une anthologie historique ») traite de la réalisation du travail. Il y est question de la grille de lecture appliquée à ces textes et de l’accent mis plus particulièrement sur les références que leurs auteurs font à trois traits distinctifs du projet industriel éducatif : technologisation, rationalisation, idéologisation. Il est probable que, pour étudier les modalités concrètes de ce projet, au-delà de ce qu’en disent ces textes, d’autres marqueurs d’industrialisation auront à être sollicités, mais les trois qui viennent d’être indiqués devraient suffire à éclairer l’éventail des points de vue en lice.

8Éventail en effet, car ces textes ne représentent aucun moment ou mouvement en particulier et leur recueil ne vise pas non plus la cohérence d’un corpus. Ce recueil ne recherche pas davantage la linéarité d’une histoire des idées ou la qualité rhétorique d’un florilège de morceaux choisis. Il fournit encore moins les matériaux d’une enquête sociologique sur une communauté d’experts. Le but ultime de cette anthologie est à la fois plus simple et plus ambitieux : offrir la plus grande diversité possible de points de vue sur l’industrialisation éducative, sur une période aussi large que possible et en se montrant aussi attentive aux avis émergents qu’aux conceptions bien établies. Et par là familiariser le lecteur avec les raisons pour lesquelles, en dépit des censures, exagérations et malentendus, la question de cette industrialisation revient si régulièrement, chargée d’enjeux si différents à chaque fois. Ce faisant, le lecteur se persuadera, espérons-le, de l’intérêt heuristique de cette question pour appréhender plus généralement les mutations de l’accès à l’éducation et à la culture aujourd’hui.

Bibliographie

Fondé en 1989 et animé depuis cette date par Pierre Mœglin, le Sif fonctionne à raison d’une journée tous les mois et demi, soit six réunions par an, auxquelles s’ajoutent une ou deux manifestations publiques. Le Sif a été labellisé par la SFSIC en 1993. Il réunit une vingtaine de membres cooptés et ses travaux interdisciplinaires portent, dans une perspective critique, sur les modalités et les enjeux de l’industrialisation de la formation initiale et continue. Ils sont structurés autour des trois axes suivants : l’analyse des outils et médias éducatifs, du manuel aux réseaux numériques ; l’étude des méthodes pédagogiques et des modèles organisationnels visant à aligner les modes de fonctionnement de l’enseignement sur celui des entreprises ; l’examen des stratégies des acteurs et des institutions, notamment dans le cadre de la territorialisation des industries éducatives. Ces travaux donnent régulièrement lieu à des colloques et publications : articles, numéros spéciaux de revue, ouvrages.

Pour citer ce document

Pierre Mœglin, «Séminaire industrialisation de la formation», Les Cahiers de la SFSIC [En ligne], Collection, 10-Varia, QUESTIONS DE RECHERCHE,mis à jour le : 20/04/2020,URL : http://cahiers.sfsic.org/sfsic/index.php?id=608.

Quelques mots à propos de : Pierre Mœglin

LabSic, Université Paris 13, Pres Sorbonne Paris Cité. Maison des sciences de l’Homme Paris Nord. Mail : Pierre.Moeglin@wanadoo.fr