FORMATION, MONDE PROFESSIONNEL
La création du master médiation culturelle, patrimoine et numérique : la pluridisciplinarité à l’œuvre
Texte intégral
Historique du projet
1En 2008, la présidence de l’Université Paris Ouest Nanterre a confié à une commission le soin de mener une réflexion sur une offre de formation transversale dans le domaine du patrimoine et de la médiation culturelle. L’analyse de l’emploi a fait apparaître deux types de débouchés possibles pour les étudiants :
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d’une part, les emplois statutaires accessibles par concours dans la filière culturelle de la fonction publique territoriale ;
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d’autre part, les emplois contractuels correspondant à des fonctions de médiation au sens large : non seulement la médiation stricto sensu (souvent assurée par des stagiaires précaires et mal rémunérés) mais aussi la documentation, la communication et la valorisation, requérant la maîtrise des outils numériques et une culture informationnelle développée, au sein des institutions culturelles en tous genres (établissements publics, associations, agences de services spécialisées dans les politiques culturelles ou la muséographie, etc.).
2C’est pour répondre à ces besoins et donner aux étudiants une formation polyvalente que deux diplômes d’université (DU) ont été conçus puis ouverts à la rentrée 2009 au sein de l’UFR « Sciences sociales et administratives » (SSA) de l’université Paris Ouest :
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le DU « Préparation aux métiers territoriaux de la médiation culturelle et du patrimoine », orienté vers la préparation aux concours de la fonction publique territoriale dans le domaine culturel ;
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le DU « Médiation culturelle, patrimoine et services numériques », visant une insertion professionnelle directe par la voie contractuelle.
3Le second diplôme a rapidement évolué vers des parcours de master mutualisés Paris Ouest – Paris 8.
4Cette mutualisation a été discutée en 2009 dans un groupe de réflexion commun aux deux universités (comprenant J.-L. Boissier, B. Dufrene, K. Zreik), puis présentée aux départements concernés, aux UFR et aux conseils des deux universités. Elle présente au moins trois avantages : complémentarité des compétences ; diversification des ressources pour les étudiants ; rationalisation des coûts de formation. Elle a été mise en œuvre à la rentrée 2010, à travers deux parcours de M2 « recherche » :
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Le parcours « patrimoine, muséologie et numérique » du master « Histoire de l’art et Archéologie » à Paris Ouest ;
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Le parcours « Théories et usages des patrimoines numériques » du master « NET » à Paris 8.
5Au moment de l’ouverture des formations, le projet était présenté ainsi :
6« Alors que le développement du numérique induit de nouveaux modes d’accès à la culture et de nouvelles pratiques professionnelles, les institutions patrimoniales (musées, bibliothèques, archives, sites patrimoniaux) et les agences de services qui se sont développées dans le domaine de la culture et du patrimoine ont besoin de médiateurs culturels disposant d’une double compétence : des savoirs fondamentaux en sciences humaines et sociales (histoire des arts, médiation culturelle et muséologie, droit, sociologie, gestion) et une solide formation théorique et appliquée aux technologies de la documentation, de l’archivage, de l’infographie. Le parcours propose aux étudiants d’acquérir pour ce secteur d’activité les repères leur permettant de maîtriser un environnement numérique ; de mettre en œuvre de nouvelles formes d’analyse et d’expression, au carrefour de nombreuses technologies (informatique, vidéo numérique, infographie, cybertextualité, génération automatique, édition multimédia, etc.) mais aussi d’explorer les nouvelles médiations qui se mettent en place dans la production de savoirs ou le domaine des loisirs. D’un point de vue épistémologique, il cherche à mettre en perspective aussi bien la conception et la mise en œuvre de nouveaux produits et services que les méthodes et outils permettant de les concrétiser.
7« Le but de ce parcours du master cohabilité au niveau M2 Paris Ouest- Paris 8 est donc de répondre aux besoins de ce domaine d’activité appelé à se développer : la numérisation du patrimoine qui a commencé depuis une quinzaine d’années connait actuellement une accélération ; elle ne se limite pas à la reproduction mais elle pose de nouveaux défis aux institutions patrimoniales, notamment en ce qui concerne la conception de contenus culturels, leur valorisation, les contraintes de diffusion et les modes d’organisation des connaissances et d’indexation ainsi que la création de services innovants.
8« Trop souvent réduit à l’exposition virtuelle, le musée virtuel est désormais une organisation complexe qui articule à partir d’un lieu patrimonial différents services (documentation, archives, service éducatif, relations publiques via les réseaux sociaux…). Par ailleurs les modes de présentation des œuvres ou des biens culturels sont d’ores et déjà repensés à partir des possibilités ouvertes par l’outil informatique. La réalité augmentée est au cœur des investigations auxquelles se livrent maintenant les professionnels du patrimoine. »
9En l’espace de trois ans, cette analyse a été confortée par le développement des médiations numériques que ce soit en ligne, in situ ou via des applications mobiles.
10La transformation des parcours en spécialités de master « Médiation culturelle, patrimoine et numérique » a été acquise en 2011 à Paris Ouest et en 2012 à Paris 8. Les coresponsables en sont Bernadette Dufrene pour Paris 8 et Rémi Labrusse pour Paris Ouest
Conception scientifique et pédagogique
11Depuis le lancement du cursus, le premier objectif a été de favoriser l’insertion professionnelle des étudiants dans le champ des métiers du patrimoine et de la médiation et donc de répondre aux nouveaux enjeux techniques et professionnels. À cette fin, l’idée fondamentale a été de concevoir un programme assurant une formation polyvalente. Les médiateurs/trices culturel(le)s doivent en effet disposer à l’issue de leurs études d’une double compétence :
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des savoirs fondamentaux en sciences humaines et sociales ;
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une formation théorique et appliquée aux technologies numériques de la documentation, de l’archivage, de l’infographie et à tous les types d’écritures numériques.
12Les étudiant(e)s suivent donc des enseignements approfondis en sciences humaines (histoire de l’art et archéologie, muséologie, médiation culturelle, droit du patrimoine et de la propriété intellectuelle, langues) et dans le domaine du numérique (traitement de l’information et des images, conception de sites, produits hypermédiatiques, écritures numériques). Ainsi ils doivent être en mesure non seulement d’assumer les nouvelles tâches induites par le développement du numérique dans ces domaines, mais, au-delà, d’inventer et de proposer des pratiques professionnelles innovantes. Ils sont ainsi appelés à s’affirmer comme les acteurs/trices d’une vision du patrimoine culturel tournée vers les publics et t prospective.
13Le deuxième défi est de concevoir la pédagogie la plus adaptée. Faut-il privilégier la formation technique aux dispositifs numériques comme le font plusieurs masters professionnalisants ?
14Tant en stage qu’en séminaire et en atelier, les étudiant(e)s sont appelé(e)s à œuvrer à la croisée du patrimoine et du numérique, en se familiarisant avec la diversité des méthodes, des pratiques et des objets d’études qui ne cessent de surgir et de se reconfigurer dans ce paysage en constante évolution technique, stratégique et conceptuelle. Les étudiant(e)s sont systématiquement encouragé(e)s à imaginer et à développer de nouvelles approches professionnelles dans ces domaines. Ils/elles sont invité(e)s à approfondir les questions liées à la recherche, la collecte, l’analyse, la gestion et la diffusion d’informations à partir de sources multimédia et de documents. Il se familiarisent aussi avec l’analyse et la mise en situation sociale des images et des structures visuelles de tous ordres, dans tous les domaines du patrimoine et dans le domaine de la création artistique : processus de production artistique ; œuvres envisagées dans leur matérialité (utilisant les technologies, du e) ; théories de l’art et phénomènes de représentation (en intégrant, pour ces derniers, les apports de l’histoire des mentalités). La diversité des usages du numérique pour la médiation culturelle, de la documentation du patrimoine aux différents modes de valorisation est également traitée.
15L’épreuve principale consiste dans la rédaction d’un mémoire en articulation étroite avec l’expérience théorique et pratique acquise au cours de stages de première et de deuxième année, sous la direction d’un maître de stage et d’un enseignant titulaire.
16La formation est assurée par des enseignants titulaires des deux universités partenaires (Paris 8 et Paris Ouest), ainsi que par des professionnels des secteurs concernés (spécialistes du patrimoine culturel et spécialistes des technologies de l’information et de la communication).
17Elle se fait en lien avec de grandes institutions culturelles et des agences de service et d’ingénierie culturelle, prêtes à accueillir les étudiant(e)s en formation et/ou en stage. Y figurent notamment le musée du Quai Branly, le Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou, ainsi que les Archives nationales, partenaire principal, avec Paris 8 et Paris Ouest, du nouveau programme d’excellence IDEFI à Saint-Denis.
18Le dispositif pédagogique donne aussi une bonne place à l’apprentissage de la conduite de projets collectifs et à la prise en compte de l’environnement. C’est ce que la fiche de formation met en évidence sur les sites des universités « En termes de savoir-faire et de compétences professionnelles, les étudiant(e)s sont encouragé(e)s à :
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développer de nouvelles approches organisationnelles et stratégiques dans un cadre professionnel d’équipe : concevoir et gérer des projets, dans des contextes complexes, rapidement évolutifs et imprévisibles, qui nécessitent des approches conceptuelles nouvelles ; développer une intelligence des situations et prendre des initiatives pertinentes dans des situations inédites ; prendre des responsabilités pour recruter, animer et orienter des équipes professionnelles, et réviser leurs performances stratégiques ; coopérer de façon efficace et faire appel, si nécessaire, à des ressources extérieures ; tirer les leçons d’une expérience pour les transposer à d’autres contextes ;
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collecter, utiliser et produire de manière active l’information : en ayant un recours intelligent, responsable et innovant aux technologies de l’information et de la communication ; en intégrant en particulier les réseaux de communication dans leurs différentes strates et fonctionnalités ; en faisant porter l’accent sur les nouvelles technologies éducatives ;
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travailler dans un contexte international : en apprenant à manier intelligemment les comparaisons internationales ; en établissant des contacts transfrontaliers par l’outil informatique ; en maîtrisant les langues modernes les plus en usage, à commencer par l’anglais, étant donné le caractère très international de la progression de la recherche dans les domaines concernés ».
19Pour finir nous soulignerons que le but de cette formation est à la fois l’adaptation dans une perspective dynamique aux besoins du marché de l’emploi et l’acquisition d’une solide culture contemporaine qui donne à chaque étudiant une vision synthétique du domaine.
Pour citer ce document
Quelques mots à propos de : Bernadette Dufrene
Université Paris 8, Hypermédia. Courriel : bernadette.dufrene@orange.fr