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> Axe 3

Caroline Angé et Émilie Flon

Écritures émergentes des objets communicationnels

Article

Texte intégral

1Dans la problématique de l’axe 3 considérant l’ancrage social des techniques en information-communication, une attention toute particulière a été portée à la question de l’écriture dans ses formes, formats et pratiques à l’époque contemporaine. Les ancrages socio-culturels ont été investigués par une approche archéologique et communicationnelle de l’écriture ayant pour présupposé le dépassement de la critique de la nouveauté par l’analyse de l’imaginaire technique (Renaud, 2007). Ainsi, le présent programme engageait un double dialogue implicite d’une part avec les Sciences de l’information-communication dans son rapport à la critique de l’idéologie contemporaine de la nouveauté et, d’autre part, transdisciplinaire dans le souci d’un « marquage » théorique d’une approche « info-communicationnelle de l’écriture » se distinguant d’une approche par le genre, via l’analyse d’une pluralité d’objets ayant trait aux écritures contemporaines.

2Ce faisant, la recherche reposait sur deux prémisses théoriques. La première est liée au résultat d’une précédente recherche sur l’épistémologie de la création et les liens Arts/Sciences déployée entre 2006 et 2011 au Gresec (Cluster 14), qui avait montré la pertinence du concept de rénovation appliqué aux « créations numériques » qui « amène à penser l’innovation non comme une collection d’objets nouveaux mais dans la capacité à redécouvrir l’existant, dans la remise à jour de l’ancien ». (Angé, 2009).

3La seconde prémisse tenait à la mise à l’épreuve de la notion « d’émergence », qui oblige à penser la complexité en évitant le réductionnisme. L’idée selon laquelle, il reste d’un processus combinatoire « un supplément » a permis de considérer que le nouveau, l’inédit, peut révéler sa présence lors de sa matérialisation dans l’analyse des « écritures émergentes » tout en structurant l’approche communicationnelle des chercheurs engagés dans ce programme.

4Ainsi, les travaux ont été articulés autour d’échanges scientifiques dans le cadre d’un séminaire annuel co-animé par Caroline Angé et Lise Renaud1 entre 2011 et 2013 avec pour thématique « les écritures émergentes des objets communicationnels ». Les conférenciers invités ont présenté leurs recherches (blogs, téléphonie mobiles, sites et applications webs, tablette numérique, wikis, etc.) sous l’angle de la problématique de l’écriture afin de considérer la pertinence de l’émergence pour envisager les enjeux sociaux, culturels et politiques des objets étudiés.

5Certaines interventions ont mis l’accent sur les approches croisées et plurielles que les SIC convoquent afin d’appréhender les écritures numériques tels que l’histoire des pratiques d’écriture et de lecture (Emmanuël Souchier), la sémiotique pour le design des écritures (Philippe Quinton), l’esthétique, l’économique, la littérature (Daniel Bougnoux). À l’issue de ce séminaire associant des chercheurs et des doctorants, les résultats de ces rencontres ont donné lieu à une restitution par la publication d’un dossier dans la revue Communication & Langages sur les « écritures émergentes des objets communicationnels » (Angé, Renaud, 2012), ainsi qu’à la participation des chercheurs à plusieurs colloques (Digital Humanities, H2PTM ’13) et séminaires externe (Le Chaos des écritures) et interne (séminaire “Participation”, journée du Graphismes d’Echirolles) pour confronter cette recherche à d’autres regards dans notre laboratoire et plus largement dans notre discipline.

6Le principal apport de ce séminaire a été en lieu et place du terme d’innovation – de par son incomplétude à rendre compte de la dialectique interne de résurgence de l’ancien dans le nouveau – d’avancer le terme de « rénovation » dans la perspective d’une conceptualisation de la notion pour qualifier les écritures numériques. En effet, si l’émergence de phénomènes nouveaux peut se produire c’est à l’intérieur de l’existant, de pratiques anciennes profondément enracinées, comme en témoigne l’étude des procès sociaux de ces objets. Le séminaire a également soutenu l’éclectisme des objets considérés afin d’envisager l’écriture à différents stades de son élaboration (de la conception aux pratiques), des imaginaires qui escortent des processus de production aux stratégies des acteurs, pour montrer précisément en quoi les écritures émergentes ne sont que des réécritures dans la réélaboration des représentations sociales qu’elles convoquent.

7Ces travaux ouvrent sur les perspectives d’une action de recherche qui déplace l’attention portée aux objets via leurs modalités communicationnelles dans l’espace social et physique, privé et collectif. Ce repositionnement réside dans l’interdépendance contemporaine entre les écrits d’écran (structuration, scénarisation, etc.) et la vie sociale et culturelle porteuse de « cadres et bordures » spatiaux et symboliques (Flon, 2012).

8Ainsi, les écritures seront envisagées moins dans leurs objectalités que dans leurs mises en espaces physiques et sociales avec l’idée d’observer les modalités dynamiques de l’agir social contenus dans les objets. C’est donc moins l’animation d’un séminaire que l’engagement des chercheurs dans des investigations empiriques et des actions de recherches localisées qui augurent de l’avenir de cette recherche collective sur l’écriture.

Bibliographie

Angé, Caroline et Renaud, Lise, 2012, « Les écritures émergentes des objets communicationnels. De la rénovation. » in Communication et Langages, n° 174.

Angé, Caroline, 2009, « Un regard sur les mécaniques poétiques » Épistémologie de la création in Les cahiers de l’Atelier Arts-Sciences.

Renaud, Lise, 2007, « Dix de discours sur le téléphone mobile. Contribution à l’analyse de discours accompagnant l’insertion sociale des objets techniques contemporains. », Thèse de doctorat de Sciences de l’information et de la communication, Université Lumière Lyon 2.

Flon, Émilie, 2012, Les mises en scènes du patrimoine : savoir, fiction, médiation. Paris : Hermès Lavoisier.

Notes

1 Lise Renaud, Maître de conférences en SIC, a rejoint le département Communication de l’université d’Avignon depuis le 1er septembre 2013. Elle est actuellement membre de l’équipe Culture et Communication du Centre Norbert Elias.

Pour citer ce document

Caroline Angé et Émilie Flon, «Écritures émergentes des objets communicationnels», Les Cahiers de la SFSIC [En ligne], Collection, 11-Varia, DOSSIER, > Axe 3,mis à jour le : 17/04/2020,URL : http://cahiers.sfsic.org/sfsic/index.php?id=527.