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L’apport de la dimension artistique au sein d’un dispositif audiovisuel dans le cadre de trois recherches – actions
Texte intégral
1Dans le cadre de trois recherches-actions, un dispositif audiovisuel s’est proposé comme un moteur pour analyser les différentes situations d’appropriation d’usages écocitoyens dans une optique créative, participative et responsable.
2Lors de la première recherche-action sur le théâtre-forum écocitoyen en 2008, la thématique principale était de prolonger la démarche du théâtre - forum initié par Augusto Boal (1977) par une démarche audiovisuelle. Alors que Boal décrit un processus de transformation qui permet de passer du statut de spectateur à celui d’acteur (le « spect’acteur »), la caméra proposait d’accompagner cela tout en suscitant auprès des participants une reformulation phénoménologique (Paillé et Mucchielli, 2005) face à la caméra. Puis, la projection de ce documentaire construit à partir de ces situations incitait à son tour les spectateurs à s’engager encore plus dans leur démarche écocitoyenne à travers les échanges dans la salle lors du débat à l’issue de la projection. Une approche médiologique se met en place « sur ces milieux, indissociablement sociaux et techniques, qui façonnent et recyclent nos représentations symboliques, et nous permettent de tenir ensemble » (Bougnoux, 1998 : 67). Ainsi un dispositif socio-technique s’est mis en place sur la base des interactions humaines (Agamben, 2006), accompagné de l’apport artistique du théâtre puis du cinéma comme moteur pour entrer en action. Le fait de se mettre en situation sur scène, puis de reformuler ce qu’il s’est passé face à la caméra comme dans la salle, en veillant à donner une meilleure représentation de soi, aide à s’engager un peu plus dans ses comportements écocitoyens dans notre cas. Ce dispositif audiovisuel propose ainsi une méthode (Cyrulnik, 2008) basé dans un premier temps sur l’outil caméra auquel est associée la dimension artistique comme un moteur d’expression lié à l’expérience proposée (Dewey, 1934 ; Ardenne, 2004).
3Dans une logique assez proche, une autre recherche-action intitulée Ecofamilies initiée en 2012, a été menée avec une caméra donnant lieu à un film documentaire alors que l’acte de création lui-même était proposé cette fois aux participants dans le cadre d’un living lab. Ceux-ci étaient invités à écrire des scénarios d’usages ou à dessiner l’application qu’ils auraient souhaité voir exister afin de mieux gérer leur consommation au sein de leur habitation. L’apport de la dimension créatrice était encore présent comme un moteur d’engagement personnel. L’art offre ici un processus de transformation pour s’engager toujours plus dans la société en tant que citoyen du monde. Ce dispositif socio-technique s’appuie sur des considérations artistiques, en partant de données intimes liées à leurs pratiques écologiques quotidiennes pour en créer une vision universelle (Menger, 2002 ; Meirieu, 2003). Ce processus de transformation par l’art rappelle ainsi notre problématique écocitoyenne du départ qui cherche à mieux définir la place de l’homme au sein du monde. L’art s’articule ici avec l’écocitoyenneté dans une vision politique.
4Dans le cadre de la dernière recherche-action avec à la fois cette dimension artistique et responsable selon ce dispositif, OpeNRJ en 2014, c’est principalement la représentation de soi à travers le récit qui est fait devant la caméra qui va être observée, quand les experts en informatique interrogés vont venir témoigner des solutions technologiques qu’ils préconisent pour proposer des données énergétiques libres d’accès. Le dispositif propose alors avec la caméra, une représentation de soi, l’articulation d’une pensée et surtout la composition du récit de cette expérience.
5Dans chaque démarche de recherche citée, il est question de processus de transformation par l’art avec l’aide de l’outil caméra. Le dispositif évolue, mais à chaque fois, la place de l’homme et sa représentation au sein de son environnement sont interrogées. Ce dispositif associe technique audiovisuelle, dimension artistique, dimension créative, dimension écocitoyenne, dimension participative et dimension politique par une représentation de soi (notamment face à la caméra) et une représentation collective (notamment dans le film ou lors du débat) pour « mieux-être-au-monde » (Schaeffer, 1999).
Bibliographie
AGAMBEN G. (2006), Qu’est-ce qu’un dispositif ? Paris, Rivages Poches, Petite bibliothèque
BOAL A. (1977), Théâtre de l’opprimé, Paris, Ed. La Découverte Poches, 1996
MENGER P. M. (2002), Portrait de l’artiste en travailleur – Métamorphoses du capitalisme, Paris, Ed. Le Seuil.
MEIRIEU P. (2003), Libre parole, Entretien réalisé par J.-P. Daniel dans le cadre des journées de Porquerolles, DVD-Carnet de route de l’Alhambra Cinémarseille.
PAILLE P., MUCCHIELLI A. (2005), L’analyse qualitative en sciences humaines et sociales, A. Colin.
SCHAEFFER J.-M. (1999), Pourquoi la fiction ? Paris, Seuil.
Pour citer ce document
Quelques mots à propos de : Natacha Cyrulnik
UNSA, Natacha. CYRULNIK@unice.fr