Les Cahiers de la SFSIC
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Le transmédia : un concept protéiforme, une pluralité d’enjeux

1Le terme multimédia a vécu depuis deux décennies de nombreuses définitions, interprétations comme le terme numérique en son temps (M. Doueihi). L’émergence du terme transmédia est aujourd’hui à la croisée d’enjeux conséquents. Une stratégie transmédia ne peut se réduire à une déclinaison de médias à partir d’une œuvre vers une diversité de médias (cross-media). Elle se caractérise par une mutualisation de la création et de la production dans une démarche créative, technologique et marketing. Sur le volet de la Création, la démarche transmédia interroge les formes narratives, le processus de création artistique et la nature juridique de l’œuvre collective et des droits associés au titre de son exploitation. Sur le volet de la Technologie (comprise ici dans son sens étymologique « état de l’art » incluant à la fois les compétences, les savoir-faire et les procédés dans un domaine donné), cette démarche questionne la définition des savoirs, la division cognitive autant que technique du travail. C’est un nouveau modèle de l’artisanat, pour l’économie numérique, qui doit être structurée autour du management de la création et de l’innovation. Sur le volet du Marché, le transmédia bouleverse les modes de financements habituels (crowd funding), incite au renforcement des stratégies de marketing viral (community management), au développement par les usages (Alpha ouverte) et au croisement des usages (cross-play).

2Pour autant, ce terme « transmédia » mobilise de façon plus particulièrement forte les concepts d’écriture, de narration à travers la notion de storytelling, d’architecture de contenus, laissant ainsi penser qu’il ne concerne que le domaine de la conception. Il nous apparaît opportun d’élargir son champ d’investigation et d’intervention à d’autres domaines, relevant à la fois de l’ingénierie, des modalités d’écriture, de la structure même des actifs composant ces nouvelles productions, mais aussi des nouvelles convergences d’acteurs et des nouvelles logiques organisationnelles de production.

3Multi, Rich, Cross, Trans, nombreux sont les préfixes attachés au terme média pour tenter de cerner les spécificités ou enjeux de telle ou telle évolution dans le domaine de la conception/production de contenus numériques. Ne pouvant ici prétendre disséquer chacune de ces spécificités, il nous apparaît important de porter un regard spécifique sur la notion de Rich média. Celle-ci, dans sa dimension opérationnelle, s’inscrit dans toute démarche permettant de créer un enrichissement conséquent dans son couplage de tout signal (image et/ou son) capté avec tout signal généré ou calculé, et ceci dans les deux sens du couplage. Au-delà des bénéfices déjà largement analysés dans le domaine des processus de médiatisation des contenus, cette fécondation croisée génère des potentialités nouvelles dans l’élargissement des champs de compétences mobilisés tels que la métrologie, la robotique, les technologies de traitement de signaux au service de nouvelles capacités de scénarisation. C’est dans ce cadre et avec ces objectifs d’hybridation entre art et techniques que se mettent en œuvre les nouveaux équipements de TELOMEDIA au sein d’un nouvel écosystème numérique du centre-ville de Toulon. Ces espaces de création et de production permettent ainsi de développer des partenariats et des collaborations dans le domaine de la science, de l’image, de l’édition, des médias, du patrimoine, des arts et des spectacles.

4Le cœur du transmédia, comme tout autre récit, se nourrit de différentes unités informationnelles et communicationnelles d’origines sémiotiques variées. Cependant, la nature spécifique de ce récit se nourrissant progressivement d’interactions nombreuses avec des supports et des acteurs très variés induit la nécessité d’une gestion modulaire des différentes unités. Dans ce cadre, l’émergence du « Media Asset Management » permet de gérer ces unités narratives en tant qu’actifs (assets). Ceux-ci sont porteurs d’une structuration riche et complexe distinguant l’essence (c’est-à-dire le matériau narratif sous ses différentes matérialités : texte, images, sons…) et les métadonnées, c’est-à-dire les données descriptives s’agrégeant et enrichissant le processus complet de conception, production et partage de l’unité narrative tout au long de sa conception et ses différentes médiations avec ses différents publics.

5Dans un autre registre, la spécificité du transmédia se situe aussi dans l’organisation même des processus de travail tendant vers une intensification d’une démarche collaborative de travail et une convergence de métiers et compétences au service de tels projets. D’une approche structurante, séquentielle des processus de production au sein de chacun des secteurs d’activités relevant de ces domaines, nous voyons émerger de nouvelles approches croisées, collaboratives, tant au sein même des logiques de travail, notamment avec les approches itératives de type « méthode agile », qu’au convergence de métiers (animateurs, infographistes, designer, architecte contenus, game designer…).

Bibliographie

Pour citer ce document

Quelques mots à propos de : Denis Gaste

Quelques mots à propos de : Olivier Dubuquoy